Tlemcen cité des arts et de l'histoire Patrimoine et sites historiques de Tlemcen |
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Posté le : 25/05/2005 à 12:50 (Lu 13779 fois) | | | Il serait temps et urgent de commencer à réhabiliter nos sites avant qu'ils ne disparaissent, ils font la beauté de Tlemcen.
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Edité le 25/05/2005 à 12:52 par goumri
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [62] |
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Posté le : 26/05/2005 à 13:32 (Lu 13773 fois) | | | OUI TU AS VRAIMENT RAISON
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [109] |
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Posté le : 19/06/2005 à 19:11 (Lu 13745 fois) | | | Une belle ville effectivement avec un patrimoine de sites et monuments qui est déclassé et bientôt déplaçé à cause des dépradations.L'anarchie architecturale et urbaine dénature ce site historique. Tlemcen était l'une des plus belle ville d'Algérie.
Doit-on parler au passé de ce qui a été cassé dans cette ville? Comme les murailles chargées d'histoire de Bab El Jiad au centre ville!
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [111] |
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Posté le : 20/06/2005 à 00:42 (Lu 13738 fois) | | | C'est un constat implacable, une triste réalité hélas!
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [120] |
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Posté le : 23/06/2005 à 18:06 (Lu 13732 fois) | | |

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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [121] |
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Posté le : 23/06/2005 à 18:14 (Lu 13731 fois) | | | Comme tant de femmes dont l'histoire a occulté le rôle, l'historiographie algérienne n'a pas traité Madame Messali - tant s'en faut - à sa juste valeur, ni à sa juste contribution à l'histoire du nationalisme algérien.
Son rapport personnel et politique à l'histoire de l'Algérie a été pratiquement totalement passé sous silence.
Lorsqu'il est question de cette femme exceptionnelle, de celle qui fut la première des militant-es du nationalisme algérien, le rôle qui lui est reconnu n'est pas différent de celui que les sociétés patriarcales ont traditionnellement dévolu aux femmes : mère d'abord et surtout, compagne fidèle dont le mérite éventuel est jugé au diapason de son silence. Il était cependant admis qu'elle avait "confectionné" le drapeau algérien. Le symbole était encore trop chaComme tant de femmes dont l'histoire a occulté le rôle, l'historiographie algérienne n'a pas traité Madame Messali - tant s'en faut - à sa juste valeur, ni à sa juste contribution à l'histoire du nationalisme algérien.
Son rapport personnel et politique à l'histoire de l'Algérie a été pratiquement totalement passé sous silence.
Lorsqu'il est question de cette femme exceptionnelle, de celle qui fut la première des militant-es du nationalisme algérien, le rôle qui lui est reconnu n'est pas différent de celui que les sociétés patriarcales ont traditionnellement dévolu aux femmes : mère d'abord et surtout, compagne fidèle dont le mérite éventuel est jugé au diapason de son silence. Il était cependant admis qu'elle avait "confectionné" le drapeau algérien. Le symbole était encore trop chargé de sens : on lui concéda la tâche de l'avoir cousu.
Marie-Victoire Louis
Madame Messali
Cahiers du Gremamo N ° 7
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [122] |
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Posté le : 23/06/2005 à 18:17 (Lu 13730 fois) | | | Rectif
Comme tant de femmes dont l'histoire a occulté le rôle, l'historiographie algérienne n'a pas traité Madame Messali - tant s'en faut - à sa juste valeur, ni à sa juste contribution à l'histoire du nationalisme algérien.
Son rapport personnel et politique à l'histoire de l'Algérie a été pratiquement totalement passé sous silence.
Lorsqu'il est question de cette femme exceptionnelle, de celle qui fut la première des militant-es du nationalisme algérien, le rôle qui lui est reconnu n'est pas différent de celui que les sociétés patriarcales ont traditionnellement dévolu aux femmes : mère d'abord et surtout, compagne fidèle dont le mérite éventuel est jugé au diapason de son silence. Il était cependant admis qu'elle avait "confectionné" le drapeau algérien. Le symbole était encore trop chargé de sens : on lui concéda la tâche de l'avoir cousu .
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [123] |
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Posté le : 24/06/2005 à 02:31 (Lu 13727 fois) | | | Je rejoins comptelement cettte analyse. Notre histoire a été confisquée. Les batisseurs de la revolution, les citoyens d'honneurs de notre pays ont été écarté ou méprisé par le pouvoir des criminels. Ils est temps que nos doyens nous comptent notre histoire car elle nous a été effacé des manuelles scolaires d'algérie.
hichem
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [124] |
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Posté le : 24/06/2005 à 08:36 (Lu 13726 fois) | | | Une histoire Tlemcénienne:

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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [125] |
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Posté le : 24/06/2005 à 08:58 (Lu 13724 fois) | | | Le nationalisme algérien
Le nationalisme algérien se développa après la Première Guerre mondiale au sein de la bourgeoisie musulmane. Au début, celle-ci demandait simplement l'égalité des droits avec les Européens. Les principaux dirigeants nationalistes, Ahmed Messali Hadj, fondateur, en 1926, de l'Étoile nord-africaine, Ferhat Abbas, accueillirent favorablement le projet Blum-Violette qui proposait, en 1936, d'élargir l'accès à la citoyenneté, sans contrepartie religieuse. Mais le projet de loi se heurta à l'hostilité des colons français et fut abandonné. En 1931, Abdelhamid Ben Badis fonda l'Association des oulemas réformistes d'Algérie avec pour devise «L'arabe est ma langue, l'Algérie est mon pays, l'islam est ma religion.» C'est dans ce contexte que les nationalistes arabisants trouvèrent une argumentation de choix. Dans un ouvrage de Tewfiq al-Madani paru en 1932 et intitulé Le livre de l'Algérie, l’auteur écrivait encore en exergue: «L'islam est notre religion, l'Algérie notre patrie, la langue arabe est notre langue.» Les nationalistes ne devaient plus l'oublier. En 1936, Les oulémas et les communistes fondèrent le Congrès musulman algérien dans le cadre du Front populaire, puis, l'année suivante, les nationalistes algériens proclamèrent le Parti du peuple algérien (PPA). Deux ans plus tard (en septembre 1939), les autorités coloniales arrêtèrent les principaux dirigeants nationalistes algériens. En 1940, le ministre français de l'Intérieur abolit le décret Crémieux de naturalisation des juifs d'Algérie. Le statut adopté en 1947 resta très inégalitaire: il prévoyait l'élection d'une Assemblée algérienne composée de 120 membres aux prérogatives restreintes. De plus, les neuf millions de musulmans de statuts coranique élisaient le même nombre de députés que le million de citoyens français. Dès 1948, les élections furent truquées afin de faire élire des représentants de l'administration dans le second collège (musulman).
http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/afrique/algerie.htm
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [127] |
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Posté le : 25/06/2005 à 09:04 (Lu 13715 fois) | | | Le 8 mai 1945, le jour même de la victoire alliée sur le nazisme, de violentes émeutes éclatent à Sétif, en Algérie.
Origines du drame
Le 1er mai 1945, déjà, le PPA (Parti Populaire Algérien), parti clandestin de Messali Hadj, alors en prison, fait défiler 20.000 manifestants musulmans à Alger.
Le matin du 8 mai, une nouvelle manifestation survient à Sétif aux cris de «Istiqlal [indépendance], libérez Messali».
Les militants du PPA ont reçu la consigne de ne pas porter d'armes ni d'arborer le drapeau algérien mais un scout musulman n'en tient pas compte et brandit le drapeau au coeur des quartiers européens.
La police se précipite. Le maire socialiste de la ville, un Européen, la supplie de ne pas tirer. Il est abattu de même que le scout. La foule, évaluée à 8.000 personnes se déchaîne et 27 Européens sont assassinés dans d'atroces conditions.
L'insurrection s'étend à des villes voisines, faisant en quelques jours 103 morts dans la population européenne.
La répression est d'une extrême brutalité. Officiellement, elle fait 1.500 morts parmi les musulmans, en réalité de 8.000 à 20.000.
L'aviation elle-même est requise pour bombarder les zones insurgées. Après la bataille vient la répression. Les tribunaux ordonnent 28 exécutions et une soixantaine de longues incarcérations (*).
Une opinion indifférente
Le drame passe inaperçu de l'opinion métropolitaine qui a la tête ailleurs du fait de la capitulation de l'Allemagne, le même jour.
Le quotidien communiste L'Humanité assure que les émeutiers seraient des sympathisants nazis !
Les émeutes de Sétif consacrent la rupture définitive entre les musulmans et les colons d'Algérie et annoncent la guerre d'indépendance.
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [129] |
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Posté le : 25/06/2005 à 12:12 (Lu 13712 fois) | | | Merci à ceux qui transmettent ces posts, moi personnlellemnt je découvre une partie de l'histoire de mon pays que je ne connaissais pas. Je crois que je vais en apprendre plus dans ce forum que je n'ai appris à l'école!!!A tous qui detiennnent les fragments de notre histoires svp informez nous!!!
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [130] |
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Posté le : 25/06/2005 à 14:27 (Lu 13711 fois) | | | La crise algérienne donne lieu, ici et là, en France, à des tentatives pour réhabiliter moralement la colonisation et l’absoudre de ses péchés. Faute de parvenir à concevoir un rapport d’égalité avec l’Algérie, les nostalgiques de l’ordre colonial ½uvrent à la déconstruction de la mémoire collective que le peuple algérien garde de la domination française. Ce projet et la stratégie de sa mise en ½uvre ne sont pas séparables. Le seul moyen pour assurer le succès, c’est de ne pas reculer devant la pratique du détournement, de l’occultation des travaux des historiens qui portent un regard neuf sur les rapports franco-algériens en les dépouillant de leur lot de ressentiments et de mythes.
Le genre qui convient le mieux à la falsification de l’histoire est l’examen d’un problème en pièces détachées. On peut dès lors faire de l’histoire tout en affirmant n’avoir pas l’intention d’en faire. Georges-Marc Benamou est coutumier de cet exercice. Dans l’exploitation du révisionnisme médiatique, voici un travail rapide qui accumule les erreurs et les omissions [1], multiplie les citations sans références, et convoque surtout des témoignages et des ouvrages de seconde main. Même s’ils sont incidemment cités, des historiens aussi fondamentaux que Charles-Robert Ageron n’ont pas été lus. Bien que cité dans la bibliographie, mon (MH) FLN, mirage et réalité [2], n’est pas utilisé. Mon (GM) Histoire intérieure du FLN [3] est citée une fois, et sur une question de détail. Le grand livre sur la guerre d’Algérie de l’historien allemand Harmut Elsenhans [4], est ignoré. D’autres, aussi fondamentaux que ceux de Sylvie Thénault, de Raphaëlle Branche [5] et de Jacques Frémeaux [6], ne sont pas davantage connus. Dès sa sortie à l’automne 2003, Un Mensonge français a fait l’objet d’un battage médiatique ; il a eu droit notamment, à une heure de grande écoute, à une tribune dans l’émission présentée par Arlette Chabot, Mots croisés, où le seul historien présent, Fouad Soufi, n’a pratiquement pas pu intervenir ; et à d’autres appréciations qui, de même, se conformaient souvent à l’éthique des clubs d’admiration mutuelle qui sont structurellement la norme de fonctionnement des réseaux médiatiques parisiens. Pourtant il a été critiqué, parfois vivement, dans quelques journaux. Notamment Benjamin Stora en a fait dans Le Monde un compte-rendu critique, tout en laissant entendre que le livre ouvrait certaines pistes.
Non que Benamou, de fait, ne pose pas quelques questions vraies - mais celles qu’il pose sont partielles. Et il leur donne des réponses dans un certain air du temps : dans l’histoire algéro-française, il n’apprécie que le delta sans quasiment dire un mot du fleuve dont il a charrié les alluvions.
Pratiquement pas un mot sur le bientôt bi-séculaire contentieux franco-algérien. A peine une douzaine de lignes, page 250, en remords furtivement tardif, sur les ignominies coloniales qui ont pesé si lourd. Même pas un rappel de la sanglante conquête de l’Algérie ; si l’on y décompte les centaines de milliers de morts de la famine de 1868, produite sur le lit du bouleversement du mode de production communautaire sous les coups de l’intrusion du capitalisme, elle coûta à l’Algérie autour d’un million de morts, soit pas loin d’un tiers de sa population. Rien sur les brutales répressions des insurrections qui s’ensuivirent au XIXe siècle, rien sur celle de l’insurrection de l’Aurès en 1916-1917. Si les milliers de victimes de l’insurrection du Constantinois au printemps 1945 sont notées à la va-vite [7] (mais dites de responsabilités algériennes éventuelles), rien sur le bilan humain global de la guerre de 1954-1962.
Si l’historien ne peut à l’évidence retenir les chiffres algériens officiels de mobilisation victimisante, et si l’on retient l’évaluation plausible de Charles-Robert Ageron [8] - historien à qui l’on peut faire confiance -, la guerre de 1954-1962 aurait tué autour de 250 000 Algériens, ce qui, rapporté à la population, représente le nombre de morts de l’épouvantable guerre d’Espagne quatre lustres plus tôt. A peine plus de choses sur les « interrogatoires poussés » qui, dans le jargon militaire français, désignaient la torture institutionnalisée ; rien sur les « corvées de bois », qui désignaient les exécutions sommaires de prisonniers, théoriquement abattus en tentant de s’enfuir. Les archives militaires françaises nous apprennent que, sous cette rubrique, il y eut, de 1955 à 1962, selon les décomptes officiels français, 21 132 « rebelles abattus lors d’une tentative de fuite » [9]. Silence enfin sur les camps de regroupement, que l’on connaît notamment grâce au beau rapport de Michel Rocard [10], qui enfermèrent plus du quart de la population civile algérienne et furent si gros de déracinements, d’exils et de déchirements du tissu social. Sur ce sujet, l’ouvrage de Michel Cornaton, celui de Pierre Bourdieu et Abdelmalek Sayad, ainsi que l’article synthétique de Charles-Robert Ageron, ne sont pas cités [11].
Pas un rappel non plus, même succinct, de la spoliation foncière qui porta pendant l’Algérie française en superficie sur 2/5 des terres, mais plus si l’on tient compte de la qualité desdites terres : les convoitises coloniales s’étaient portées naturellement sur les meilleures d’entre elles. Il n’y a que les Palestiniens qui, dans l’histoire des colonisations, aient été davantage dépossédés (80% de leurs terres ont été confisquées si l’on en croit tels « nouveaux historiens » israéliens ). Rien non plus sur les famines et les disettes, souvent accompagnées de choléra et de typhus - 1868, 1888, 1897, 1909, 1917, 1920 [12] -, sur celle de 1941-42, aggravée par le typhus [13], rien sur les épidémies dévastatrices, non jugulées par un encadrement sanitaire squelettique. Pas davantage de notations, si ce n’est par vagues et hâtives allusions, sur l’inégalité systématique institutionnalisée et le racisme, les promesses non tenues, les élections truquées. Juste, à la sauvette, une notation non analysée sur « un apartheid sans nom » (p. 30). Silence encore sur le service militaire obligatoire imposé sans contreparties depuis 1912, et qui s’imposa effectivement à partir de 1916 à des classes d’âge entières pendant trois décennies, ni sur l’obligation scolaire qui, elle, ne fut jamais réalisée par la puissance tutélaire qui se targuait de faire ½uvre de civilisation : en 1914, seulement 5% des enfants algériens étaient scolarisés dans le système d’enseignement français, à peine 10% l’étaient au moment du déclenchement de l’insurrection de 1954.
Certes on conviendra sans difficultés que la colonisation ne fut pas qu’une abjection - elle fut par certains aspects, au moins dans sa bonne et dans sa mauvaise conscience - relativement différente de la pure réification marchande et financière de la mondialisation capitaliste actuelle. Mais elle fut, aussi, largement une ignominie.
Dans le cas de Georges-Marc Benamou, Français d’Algérie et juif arraché tout jeune enfant à sa patrie algérienne, même une douleur réelle n’autorise pas à dire n’importe quoi. Ainsi, « totalitarisme » est mis dans son livre à toutes les sauces. Le FLN fut pour lui « totalitaire », « un parti totalitaire ». Souvent, terrorisme est traité en quasi synonyme de totalitarisme. Or, autoritaire et cruel ne veut pas forcément dire totalitaire. Pour qui connaît un tant soit peu le FLN comme objet d’histoire, en aucun cas l’historien ne pourra retenir le concernant la signification courante que le terme de totalitaire a prise depuis Raymond Aron et Hannah Arendt -celui d’une religion séculière imposant à la société et à l’État le poids de sa ter-reur idéologique-, mais bien davantage l’acception des idéologues italiens Alfredo Rocco et Giovanni Gentile, pour lesquels il signifia la dévotion absolue à la nation et au pouvoir d’État.
En fait de totalitarisme, le FLN fut surtout la projection politique de l’esprit de surveillance et de l’unanimisme communautaires de la société algérienne. C’est pourquoi, tout violent qu’ait pu être sur le terrain le FLN/ALN, il surfa plus sur certaines tendances profondes de cette société qu’il ne s’imposa à elle par la seule violence. L’unicité et l’unanimisme cultivés par l’idéal communautaire y répondirent en écho, par exemple, au discours populiste révolutionnariste d’un Boumediene. Pour cela, même autoritaire et violent, le FLN - celui du moins qui a triomphé - ne peut même pas être considéré comme une vraie dictature.
Par ailleurs, contrairement à ce que dit l’auteur d’Un Mensonge français, le FLN ne fut pas un « parti », mais un front supervisé par un appareil militaire. Il n’eut en tout cas rien à voir avec un parti communiste à la soviétique : il ne fut jamais qu’une courroie de transmission du pouvoir d’État tôt militarisé, et non le maître de ce même pouvoir d’État comme il le fut en URSS. Citant Guy Pervillé, Benamou écrit que les institutions du FLN furent « inspirées des statuts du PC de l’URSS » (p. 207). Le FLN s’inspira en effet dans ses statuts de 1959 du modèle du « centralisme démocratique ». Mais ce qu’il oublie de dire, c’est que ces statuts furent soigneusement expurgés de toutes les références de classes. La direction du FLN, cartel d’élites d’origines diverses et sans autre dénominateur commun que la libération de l’Algérie de la servitude coloniale, évoluait au-dessus de multiples factions.
Il y eut en effet de tout au FLN. Même si un appareil militaire violent y a très tôt emporté - cela dès l’été 1957 -, cela n’autorise pas à mettre sous le boisseau les talentueux ministres et cadres civils, et tous ces hommes de dossiers qui - à l’UGTA, dans les ministères et ambassades du FLN - y travaillèrent avec acharnement et avec un esprit ouvert à la libération de leur patrie. Que Georges-Marc Benamou lise par exemple les mémoires de Saad Dahlab, le dernier ministre des Affaires Étrangères du GPRA [14], s’il est désireux de remédier à ses jugements tranchés.
Et, en 1955-56, même un pur maquisard comme Belkacem Krim était partisan de formules de compromis, formules que le blocage de la situation politique enterra. Si vraiment, comme un Alain Savary en avait engagé le processus, une stratégie par étapes à la tunisienne avait été fermement proposée au FLN, tous les documents disponibles indiquent que sa direction l’aurait acceptée. On sait - mais Benamou ne le sait pas ou ne le dit pas - que le torpillage prit la forme, le 22 octobre 1956, de la piraterie aérienne française qui suspendit toute vraie négociation pour quatre ans. Dans les thrènes que l’auteur adresse ici et là aux occasions perdues, Alain Savary, désavoué par son lâche gouvernement, et acculé à la démission, n’a droit à aucun salut. Ce n’est à vrai dire pas que le 6 février 1956 que Guy Mollet s’est « déshonoré », « et avec lui la République » (p. 86).
Parmi les procès qu’il instruit contre De Gaulle, l’auteur lui reproche d’avoir intronisé le FLN comme seul représentant du peuple algérien, notamment à la suite des manifestations citadines de décembre 1960 qui lui démontrèrent la représentativité dudit FLN. : « La leçon du voyage. Oui, décidément, le FLN, c’est l’Algérie » (p. 179). En effet, même s’il n’était pas le seul mouvement nationaliste en scène - il y avait le MNA -, et que cela plaise ou non, le FLN incarnait l’indépendance depuis si longtemps désirée par le peuple algérien. Ce n’est pas De Gaulle à lui seul qui en fit « l’incarnation de la nation algérienne. » En histoire, on ne choisit généralement pas ses interlocuteurs. Ils s’imposent à vous. En l’occurrence, qui avait lancé et conduit la guerre, si ce n’est le FLN ? Et en toutes circonstances, discuter avec des fantoches, avec des interlocuteurs préfabriqués ou de convenance, est une perte de temps et une faute politique.
Quant à « l’anticolonialisme totalitaire », qui est un des topoi du livre, un syntagme bricolé ne peut tenir lieu de concept. Et il faut savoir ce que totalitarisme veut dire. Que l’anticolonialisme soit devenu une norme éthique n’autorise certes pas le manichéisme échafaudé en son nom, mais pas non plus sa dévalorisation vulgaire en épouvantail politique. Historiens, nous n’avons rien à voir avec ce procès intenté aux « images pieuses » qui auraient été imposées par ce « totalitarisme. » Rappelons que les images que propose l’historien ne peuvent qu’être impies parce qu’il tente de dire le vrai contre tous les stéréotypes et contre toutes les conventions de toutes les histoires officielles et l’exposent aux feux croisés des uns et des autres. Nous les avons subis l’un et l’autre et nous en sommes fiers. Et, contrairement aux allégations de l’auteur pour qui l’histoire de la guerre d’Algérie « ne s’étudie pas » (p. 36), nous sommes quelques-uns à penser contribuer à l’écrire.
La « religion anticolonialiste » (p. 101) n’était en tout cas pas hégémonique dans les années cinquante ; elle était plutôt à contre-courant. L’un de nous (GM) a en mémoire, dans son expérience de lycéen, les boycotts et l’ostracisme dont quelques-uns de ses condisciples et lui-même furent pour cela l’objet au très bourgeois lycée Ampère à Lyon, sans compter les tabassages par les CRS lors de manifestations anticolonialistes, pour ne pas parler de la répression qui s’abattit sur les jeunes anticolonialistes ou soldats refuzniks. G. M. Benamou a-t-il entendu parler de Jean Muller ? Connaît-il le sort qui fut celui de Marc Sagnier ? Même si la répression y fut quantitativement moins sanglante que celle du 17 octobre contre les Algériens, les victimes du métro Charonne, le 8 février 1962, étaient bien des militants communistes anticolonialistes.
Et ne pourrait-on être anticolonialiste sans épouser le manichéisme de Sartre, de Fanon ou de Ben Bella ? Lutter pour l’indépendance de l’Algérie, ce n’était pas forcément approuver en tout le vent dominant au FLN dans ses schématisations communautaristes, et il n’y eut pas qu’Albert Memmi et Raymond Aron dans ce cas. Des anticolonialistes aussi prestigieux que Francis Jeanson ou Henri Curiel eurent des débats parfois très vifs avec des militants de la Fédération de France du FLN, voire eurent maille à partir avec lui. Alors, « de leurs utopies [des « anticolonialistes totalitaires », NDA], il ne reste rien que des cendres, des ruines » ? (p. 113). Notre contempteur d’anticolonialisme range dans ces dernières la « révolution algérienne. » Or, le terme de « révolution » ne fut, au FLN, que l’équivalent sémantique de guerre de libération ou de jihâd. Et, avec Boumediene, le discours et la pratique révolutionnaristes furent une rhétorique et un moyen de clientéliser globalement le peuple pour qu’il reste docile et soumis au pouvoir d’État. Ceci dit, une aspiration libertaire, celle qui mut les hommes de la guerre d’indépendance, ne peut en aucun cas être confondue avec sa mouture bureaucratique. Et, en histoire, tout est dialectique, et toute analyse tranchée qui ignore la dialectique relève plus de l’idéologie que de l’histoire.
Alors, quels peuvent être les dessous des dénonciations de Benamou ? Ne s’inscrivent-elles pas en contrepoint de ses sanglots mal contenus sur « l’ultime soupir de l’Empire (avec une majuscule, NDA) français », sur « le terminus de l’histoire pour la France d’hier » p. 18). Serions-nous dans la plus ordinaire des nostalgéries ? Les femmes algériennes sont toujours « les fatmas » (p. 34, p. 96...), sans majuscules et sans guillemets... En tout cas, nous sommes dans le narcissisme nationaliste français : l’auteur adresse un péan à cette Algérie française qui aurait été « le produit de cette culture laïque et universaliste » (p. 51), mais en ignorant apparemment que ce fut selon une variante de cette culture qui confisqua les biens dévolus aux fondations pieuses et au système d’enseignement traditionnel (biens habûs) et les fit servir à instrumentaliser l’islam par un clergé musulman aux ordres ; et qui, aussi, institutionnalisa la discrimination et le racisme. Ne se contredit-il pas quand il parle d’ « apartheid » (p. 30) ? A moins que l’apartheid ne fasse partie des catégories de l’universalisme...
Que dire du panégyrique de Camus qu’il dresse en tentant laborieusement d’éclaircir sa fameuse formule : « Je préfère ma mère à la justice » (traduisons : je préfère les Français d’Algérie au FLN, son combat fût-il juste). Mais, s’en étonnera-t-on, silence sur le Jules Roy de La Guerre d’Algérie [15] qui préférait, de son côté, aimer autant la justice que sa mère, Jules Roy, tout autant Pied-Noir que Camus, et au surplus colonel de l’armée de l’air et à contre-courant de son milieu militaire d’origine : il déclara finalement, non sans douleur, ne pouvoir que soutenir le camp des pouilleux violentés. La seule fois où Benamou mentionne Jules Roy (p. 249), c’est pour noter qu’un vieux colon qui lui ressemblait était antisémite. Ceci dit, il ne faut surtout pas comprendre que Jules Roy l’était.
Comme Camus, notre auteur ne dit jamais « les Algériens », mais « les Arabes », conformément aux vieilles taxinomies coloniales -qui furent aussi celles de Maurice Thorez- qui voyaient en les Algériens une mosaïque de communautés : « Les Arabes, les Kabyles et les Européens » (p. 265). Cela ferait rire aujourd’hui même le plus obtus des islamo-arabistes ou le plus benêt des berbéristes. Quelle amertume : il y a des gens qui en sont encore là au début du XXIe siècle... La citation que Benamou produit page 94, tirée de la préface de Camus aux Chroniques algériennes en 1958, pourrait à la virgule près figurer dans n’importe quel rapport d’officier français du 2ème Bureau. Qu’on en juge :
[Si Camus] « ne peut approuver une politique de conservation ou d’oppression, [il ne peut] non plus approuver une politique de démission qui abandonnerait le peuple arabe à une plus grande misère, arracherait de ses racines séculaires le peuple français d’Algérie et favoriserait seulement, sans profit pour personne, le nouvel impérialisme qui menace la liberté de la France et de l’Occident ».
Le livre fonctionne aussi, au moins implicitement, comme une défense de l’universalité du capitalisme et du marché, et parfois fort explicitement, comme un dédouanement de la guerre de reconquête coloniale française et de son arsenal répressif corollaire. Par exemple, il est dit, sur les manifestations citadines de décembre 1960 organisées à l’occasion de la visite de De Gaulle, que « les forces de l’ordre [...] ne savaient plus qui réprimer » (p. 176). Doit-on rappeler qu’elles l’ont vite su ? : il n’y eut, parmi les morts, pratiquement que des Algériens alors que les manifestants acclamaient le FLN, et, en même temps, soutenaient la politique gaullienne engagée par le discours du 16 septembre 1959. Mais, chez Benamou, cela donne : « Chacune des étapes du général De Gaulle a ainsi apporté son lot de morts arabes et européens ». No comment.
Toujours sur la répression, le général Massu et le colonel Godard, dits « hostiles à toute ségrégation » (p. 52), sont présentés, ou peu s’en faut, comme de doux humanistes alors que tous les gens normalement informés savent que, quels que fussent les prurits humanitaires de tel ou tel, l’armée française fut plus massivement et plus industriellement tortionnaire que certains éléments d’une ALN, fondamentalement artisanale dans sa violence, et qui, au moins, luttait pour l’affranchissement des Algériens ; et que les Algériens se défendaient contre un conquérant qui les avait conquis dans la brutalité. Quand on ne se contente pas de l’écume des aboutissements factuels, c’est la violence française qui fut première. Certes, Mouloud Feraoun, dans son Journal [16] « dresse un portrait terrifiant des futurs maîtres de l’Algérie » (p. 208). Saisi par le syndrome de la dénonciation hémiplégique qu’il juge par ailleurs sévèrement, notre dénonciateur oublie de dire que Feraoun brosse un tableau tout aussi terrifiant des pratiques de l’armée française.
Au vrai, ces « Arabes » combattent-ils vraiment pour leur liberté ou sont-ils primairament soumis à leurs pulsions violentes quand ils ne sont pas tout bonnement manipulés ? Les pages 179-180 offrent au lecteur une anthologie de facture coloniale sur ces jeunes d’Alger incapables d’agir, en décembre 1960, sans sollicitations extérieures. En d’autre temps, on enseignait que les « indigènes » étaient « influençables. » Si ces jeunes se sont alors mobilisés, ce fut, d’après notre auteur, du fait d’une manipulation de « militaires d’obédience gaulliste des SAU » [17]. Si l’on ne peut exclure de telles man½uvres pro-gaullistes, qui, en fait, durent simplement signifier aux manifestants qu’ils avaient le champ libre, les acteurs que met en scène le texte de Benamou, appartiennent bien à une masse manipulée (donc manipulable), laquelle a donc affronté les balles des « forces de l’ordre » en brandissant des drapeaux algériens cousus dans l’improvisation (les manipulateurs français avaient-ils été à ce point inconséquents qu’ils ne leur avaient pas fourni les drapeaux ?), mais, selon cette version, sans la spontanéité sur laquelle tous les rapports militaires français conservés aux archives insistent d’abondance ; cela à tel point que l’organisation FLN d’Alger prit le train en marche en tâchant à la va-vite d’encadrer les manifestations. Des musulmans manipulables, et qu’il vaudrait mieux laisser à leur torpeur, cela renvoie à un essentialisme d’école primaire orientaliste sur l’islam. L’islam incontournable.
Un demi-siècle plus tard, « rien n’a changé » (p. 16), puisque ressurgissent des affaires de foulard. C’est évidemment faux ; tout a changé : les femmes, en Algérie, souvent contre leur société et contre le pouvoir, sont courageusement devenues des actrices de leur vie, et souvent des militantes ; et elles sont quasiment toutes scolarisées. Nous sommes des laïques et nous n’aimons pas le voile, pas plus en France qu’ailleurs, car nous savons combien il est signe d’oppression masculine et de ségrégation sexuelle sous des oripeaux prétendument musulmans. Ceci dit, en France, il est d’ores et déjà résiduel et il est symptomatique d’un malaise multiforme porté structurellement par la sauvagerie capitaliste actuelle, génératrice de régression sociale et de violence, et productrice des replis communautaristes qui fragmentent et fragilisent les résolutions politiques.
Il y a certes un obscurantisme sous couleur d’islam ; il existe, mais pas comme une essence qui serait en soi musulmane : Benamou note lui-même, en se référant à Germaine Tillion, que telles tendances réactionnaires plongent beaucoup plus leurs racines dans la préhistoire que dans l’islam tard-venu. Et les stéréotypes sur un islam en soi obscurantiste font bon marché des tendances rationalistes actuelles très vivantes dans le monde arabe - vivantes mais suspectées ou pourchassées par les pouvoirs - sans compter celles de l’islam classique où le terme de ilhâd (athéisme) est attesté plusieurs siècles avant l’apparition de son synonyme français. Mais Benamou accrédite les facilités/vulgarités médiatiques ignorantes de vent d’Ouest à la mode sur le « choc des civilisations. » Celles qui représentent une césure qui serait essentielle entre Islam et Occident.
Ces « Musulmans », ils se sont rendus coupables de tortures « pratiquées par l’ennemi algérien » (p. 33) sur les Français d’Algérie. La réalité oblige à dire qu’elles furent beaucoup plus largement appliquées par des Algériens à d’autres Algériens, ceux qui étaient réputés traîtres et qui furent, de fait, souvent impitoyablement traités. Mais, à lire Benamou (p. 81), on peut comprendre que seuls des Français furent torturés et exécutés par la police de Boumediene après l’indépendance. Qu’il se rassure : les Algériens à l’avoir été furent sans comparaison bien plus nombreux que les Français. Et jamais la violence ne sépara les « Musulmans » des « Européens ». Elle exista en intensité variable dans les deux camps.
Les seuls « Arabes » que Benamou sauve, les hommes de son c½ur, ce sont les « libéraux » de l’UDMA réputés francisés, placés par l’appareil militaire comme tête d’affiche internationale au GPRA, en particulier la figureemblématiquedeFerhatAbbas,qui est dit croire encore en 1945 à l’intégration à la France (p. 267). Au prix d’un travestissement de leur itinéraire : l’auteur ignore le Manifeste du Peuple algérien qu’Abbas signa en 1943, et qui était déjà bien loin d’être un manifeste intégrationniste. Les autres sont renvoyés aux gémonies dans une thématique, voisine de celle du maccarthysme, comparable à celle de ces officiers français du 2ème Bureau qui assimilaient faussement le FLN au communisme ennemi du Monde Libre.
Finalement, on l’aura compris, ce livre pèse lourd de son poids de nostalgies coloniales et nationalistes françaises. « L’agonie de l’Algérie française » est vue comme « une amputation » (p. 249), « comme ce fut le cas pour l’Alsace-Lorraine » en 1871 : Thiers - De Gaulle, même combat. Et les « Arabes » ont tout lieu de regretter d’avoir disjoint leurs destins de ceux de la France : n’y eut-il pas des enfants pour scander à Oran « Algérie française ! » lors de la visite de Chirac en mars 2003 ? Au vrai, le régime algérien actuel est tellement honni et méprisé que tout ce qu’il clame est suspecté et rejeté, y compris parfois même la geste résistante de 1954-62 dont il se réclame et qu’il manipule. Il n’y a donc rien d’étonnant qu’une partie de l’opinion algérienne le voie comme un prolongement du système colonial. Il n’y a rien d’étonnant non plus que la nostalgie coloniale puisse figurer un remède à la dureté des temps et servir à stigmatiser le pouvoir algérien. Faut-il préciser que cela n’entache en rien la légitimité du combat du peuple algérien pour son indépendance ?
Plus franco-françaises sont les autres accusations du livre, notamment la charge portée contre De Gaulle, jugé piètre négociateur et politique médiocre ayant agi dans l’imprévision. Surtout, il est accusé de « lâchage », voire de « largage » de l’Algérie. On évite à peinele « bradage », comme aurait dit Le Pen. C’estlàunemoutureàpeinenouvelledesvieuxprocès faits à De Gaulle par le nationalisme français et tels de ses procureurs français d’Algérie. Le FLN est accusé d’avoir été « allié à De Gaulle » (p. 56), comme si un accord de compromis entre adversaires était une alliance. Mieux : il aurait existé un « axe De Gaulle-Sartre » (p. 100) et, même, De Gaulle aurait été le « complice » de Sartre (p. 103), Sartre aurait été le « Malraux off » (p. 107) du président de la Ve République. Il ne saura être question ici d’exonérer Sartre de son manichéisme et de ses jugements tranchés ; mais tout de même ; une attirance éventuelle, d’ailleurs à mieux démontrer, n’est pas une alliance et elle ne constitue pas un « axe ».
Au surplus, nous nageons en plein contresens quand nous voyons traiter De Gaulle de vulgaire cartiériste séduit par un frileux repli hexagonal. En fait, on sait maintenant que De Gaulle fut un politique soucieux de l’arrimage à l’Europe et à la mondialisation capitaliste, qui déjà se profilait, et cela sous les scansions vergogneuses gaulliennes du national, ainsi que l’a lumineusement montré l’historien Harmut Elsenhans, professeur à l’université de Leipzig. Sa grande thèse sur la guerre d’Algérie était parue à Munich en 1974. Benamou, qui ne la connaît pas, est à l’unisson du narcissisme français ordinaire qui répugne à lire les langues étrangères. Tout de même, Elsenhans a fini par être traduit en français et publié en France en 1999. Il aurait donc pu le lire.
Rien de bien nouveau dans Un Mensonge français sur les préparatifs du retour au pouvoir de De Gaulle, si ce n’est beaucoup de remplissage journalistique. Rappelons sur ce point que Christophe Nick, qui est une fois cité, a fait sur ces matières le point de manière exemplaire [18]. Ce qui est surtout attaqué, c’est le « dogme » d’une « infaillibilité gaulliste sur la question algérienne » (p. 168) (alors que les historiens sont d’accord sur l’empirisme et le pragmatisme du président De Gaulle) ; et surtout, il fut le responsable d’une « défaite française ». Sur les menaces de partition de l’Algérie, pour lesquels fut utilisé à contre-temps Alain Peyrefitte, le livre ne dit pas qu’elles ne furent vraisemblablement envisagées que comme un moyen de pression sur le FLN.
Ce sont les accords d’Évian qui sont principalement portés au passif de De Gaulle, ces accords qui auraient été par lui bâclés, et jamais respectés (« violés », p. 41) par un FLN qui aurait négocié avec l’idée bien arrêtée de ne pas les honorer (pp. 203 et sq.). Benamou ne dit pas que les hommes qui appliquèrent les accords d’Évian ne furent pas ceux qui avaient négocié ces accords : pour résumer, les ex-centralistes du MTLD, Ben Khedda et Dahlab, vrais politiques et hommes de dossiers, chassés de l’exécutif algérien en août 1957 par les colonels de pouvoir, et rappelés au GPRA en août 1961 parce qu’ils étaient les plus capables de conduire avec les Français la négociation - ceux-là même que Benamou range sans discernement parmi « les révolutionnaires de Tunis. » (p. 205) De cette conduite, l’appareil militaire algérien, et notamment le segment militaire qui avait le vent en poupe - l’État-Major Général (ÉMG) dirigé par le colonel Boumediene - était bien incapable.
Fut donc déléguée la charge de la négociation à cette équipe de civils compétents où émergea aussi la figure brillante du jeune Mohammed Seddik Benyahia. Mais, pendant toute la poursuite des pourparlers, les hommes de l’ÉMG ne cessèrent de les dénoncer démagogiquement comme traîtres et néocolonialistes, tout en reconnaissant en privé que de tels accords étaient inévitables. Puis, la paix et l’indépendance acquises, ils congédièrent lesdits civils et s’emparèrent du pouvoir par la force à l’été 1962. Il est donc faux d’écrire que « la plupart des dirigeants du FLN ne voulaient pas appliquer ces accords ». Ceux qui les ont contractés furent exclus du pouvoir et marginalisés. Sans compter que l’OAS aida aussi puissamment à les rendre inapplicables. Ceci dit, aucune guerre ne se termine bien car aucune guerre n’est génératrice de morale. Benamou, lui, ne voit « pas une seule qualité aux accords d’Évian » (p. 212) alors même qu’ils consacrèrent l’inéluctable indépendance de l’Algérie et qu’ils mirent fin à une guerre cruelle et injuste imposée à un peuple pauvre, opprimé et mal armé.
Dans la cruauté de la guerre, il y eut le sort des harkî(s). Benamou parle à leur sujet de « massacre collectif » à raison de dizaines de milliers de massacrés. A vrai dire, et si l’on veut faire ½uvre d’historien sachant raison garder, une série de massacres, même sanglants, ne relèvent pas forcément de « l’extermination systématique » (p. 221). Les horreurs dont les harkî(s) furent les victimes ont été décrites, et nous avons été de ceux qui ne craignirent pas d’en parler. Mais dans certaines régions - l’Ouest Constantinois notamment -, les harkî(s), qui furent tout sauf des enfants de ch½ur, avaient fait des dégâts et s’étaient attiré la haine de bien des populations. Il faut le dire.
Ceci dit, jamais ni Ben Khedda, ni l’ÉMG, dirigé par Boumediene, ni personne au GPRA, n’a jamais donné des ordres de massacrer. C’étaient des hommes d’ordre à qui l’anarchie du printemps 1962 faisait horreur. Mais la direction de Tunis était obsédée par les conflits internes et la course au pouvoir conduite par l’ÉMG. Il y eut nombre d’actions de sous-ordres, souvent des « marsiens » [19], ralliés tardifs à l’ALN qui tenaient à surprouver dans le sang un patriotisme tardivement démonstratif. Souvent, des communautés, dont, à l’origine, telles jamâ‘a(s) [20] avaient choisi parmi leurs jeunes hommes lesquels iraient à l’ALN et lesquels iraient dans les harka(s), protégèrent leurs ressortissants. Lorsqu’ils purent rejoindre leurs contribules, les harkî(s) purent être plus facilement protégés que lorsque l’isolement les rendait plus vulnérables.
Les « 10 000 disparus » parmi les harkî(s), ce n’est pas là un chiffre « gaulliste », ainsi que le représente Benamou, c’est le chiffre avancé par Jean Lacouture dans Le Monde en novembre 1962 sur la foi de sources militaires françaises qui avaient bien peu le FLN en sympathie - il suffit pour s’en convaincre de lire leurs rapports conservés aux archives -, et qui n’avaient aucune raison de minimiser le chiffre des massacrés. Même si Lacouture a pu ultérieurement être pris dans l’air du temps de la mobilisation victimisante en avalisant l’impossible chiffre de 100 000 morts [21] . Sur ce sujet, contrairement à ce qui est affirmé dans le livre, les archives françaises ne sont plus complètement « cadenassées ». Les cartons concernant les massacres des harkî(s) ne permettent en aucune façon d’avaliser le chiffre de 70 000 victimes qu’avance Benamou. Dans l’inflation victimisante, certains sont allés jusqu’à 150 000 morts : encore un effort, et il n’y aura pas eu un seul survivant...
Ces chiffres idéologiques sont martelés par leurs producteurs sans aucune preuve historique sérieuse. Rien de tel dans les documents démographiques tels que ceux utilisés pour ses bilans de victimes de la guerre par Charles-Robert Ageron. Rien de tel dans le central carton 1H1793 des archives du SHAT [22] consacré aux massacres de harkî(s). Le rapport du général de Brébisson du 13 août 1962, qui s’y trouve, décrit des horreurs « d’une extrême violence » et il estime, à cette date, que, « d’après les renseignements recueillis, on peut [...] estimer à plusieurs centaines le nombre d’anciens supplétifs massacrés » ; et que, certes, « tout se passe comme si le FLN profitait de la période actuelle pour effectuer contre les Algériens ayant servi la France une purge dont il laisse la responsabilité aux échelons subalternes. » Un rapport du 2ème Bureau du lieutenant-colonel Prunier-Duparge, également du 13 août, recense « 328 harkis ou moghazenis » « victimes de massacres collectifs ou exécutés ces dernières semaines », dont 246 en wilâya 2, 72 en wilâya 3 et 10 en wilâya 1 [23]. Et un rapport du 9 novembre 1962, pour le Sud Constantinois, parle d’un charnier de « cent anciens membres du GMS [24] de M’chounèche », de plusieurs dizaines d’exécutions et de centaines de prisonniers.
Tous les rapports évoquent les tâches dégradantes et l’humiliation infligées aux harkî(s). Une enquête de la Croix Rouge parue dans L’Observateur du Moyen-Orient et de l’Afrique du 1er mars 1963, évalue le bilan à « des milliers de victimes. » La Croix Rouge a enquêté sur « des camps de harkis », mais elle estime dans ce rapport que, « contrairement à certaines rumeurs », il n’en existerait pas ès-qualités, tout en attestant l’existence de « camps de travaux publics ouverts » où les harkî(s) sont surveillés. Au surplus, ajoute la Croix Rouge, « Ben Bella s’est efforcé, après avoir repris la situation [politique, NDA] en mains, de soustraire les harkis menacés aux règlements de compte en les transférant dans des régions où ils n’étaient pas connus. »
Et Benamou ignore les trois articles fondamentaux de Charles-Robert Ageron qui, à notre avis, font autorité, ou devraient faire autorité sur le sort des harkî(s) [25] : Ageron, qui a démontré, preuves démographiques à l’appui [26], que le nombre des victimes algériennes de la guerre fut de beaucoup inférieur aux chiffres de victimisation produits par l’histoire algérienne officielle, est un historien fiable, bien éloigné des fracas et des fatras médiatiques. On ne pourra donc que lui faire confiance lorsqu’il affirme que les chiffres délirants avancés par certains « historiens » n’ont aucun fondement. Quoi qu’il en soit, dans un sens ou dans un autre, l’inflation victimisante est une offense à l’histoire.
A titre hypothétique, l’origine de ces dizaines de milliers de gens tués comptabilisés comme harkî(s) pourrait provenir d’un amalgame non innocent avec les Algériens tués d’une manière ou d’une autre par l’ALN/FLN de 1954 à 1962, et comprenant, outre les harkî(s) tués en 1962-63, les « traîtres » abattus et les victimes des purges internes de l’ALN, total général que l’un de nous (GM) a proposé, au grand maximum, à une cinquantaine de mille en chiffres ronds [27]. Reste qu’il y eut une responsabilité certaine du pouvoir politique français dans l’abandon à leur sort des harkî(s).
Un Mensonge français insiste enfin sur le sort des Pieds-Noirs, ces « empêcheurs de l’histoire » (p. 246) pour De Gaulle, et surtout sur le massacre du 5 juillet 1962 à Oran. Sur ces douloureux événements, il n’y aurait « aucune étude historique définitive » (p. 252). Il ne faut pas pour autant oublier la décisive contribution de Jean-François Paya à l’ouvrage collectif L’Agonie d’Oran [28], lequel Paya est le seul, avec Fouad Soufi, à pouvoir écrire un livre sur ce sujet. Là, le bilan est plausible et Benamou s’y révèle un peu moins non-historien que d’ordinaire : il y aurait eu à Oran ce jour de 200 à 300 morts sur les 4 000 à 6 000 Pieds-Noirs tués de 1954 à 1962 qu’il comptabilise [29], le chiffre fourni pour la même période par les archives militaires françaises étant de 3 666 (soit moins de 0,36% de la population contre 2,7% pour les Algériens avec les chiffres retenus par Ageron. Il y eut donc, au prorata de la population, du fait de la guerre, près de 7,5 fois plus de morts côté algérien que côté pied-noir.).
Dans le sort des massacrés d’Oran, Benamou évoque une plausible provocation de « l’ALN de l’extérieur » (une fusillade anonyme qui fit une centaine de morts, dont les trois quarts d’Algériens, et qui fut suivie par le rapt de centaines d’Européens et leur massacre à la cité Petit Lac), mais sans dire que le FLN à Oran, obéissant au GPRA, le Gouvernement provisoire légal, il était important pour l’armée des frontières et l’ÉMG qui la contrôlait, de démontrer que ce FLN-là était incapable d’assurer l’ordre alors que des troupes dépendant de l’ÉMG le seraient. De fait, ce furent des troupes survenues du Maroc, conduites par le capitaine Bakhti, qui rétablirent brutalement l’ordre à Oran.
On ne trouvera pas dans Un Mensonge français d’évocation aussi obsédante de ce que Pierre Vidal-Naquet a appelé « les crimes de l’armée française », ou des crimes de l’OAS, à l’exception de l’assassinat de Mouloud Feraoun, que de celle des massacres de harkî(s) ou d’Européens à Oran le 5 juillet 1962. Les violences de l’OAS sont aussi factuellement évoquées à travers les obsessions d’enfance de l’auteur dans la confusion des affrontements OAS-FLN, et l’évocation de la victime enfantine exemplaire, Delphine Renard, grièvement blessée lors d’un attentat visant André Malraux. Plus largement, les violences de l’OAS figurèrent le bouquet final d’une violence coloniale séculaire. Rien ne permet dans le livre de s’en rendre compte : c’est que nous y sommes dans l’émotionnel ; pas dans l’histoire. Finalement, à lire Benamou, les « anticolonialistes totalitaires » se sentent moins seuls à faire fonctionner leur « mémoire hémiplégique. »
Enfin, côté algérien, est-ce innocent d’affirmer que « le seul parti fréquentable en Algérie [est] le RCD, militant intraitable de la laïcité », et qu’il « fait partie des principaux partis d’opposition laïcs au FLN » (p. 273) ? D’une part, le FLN n’est plus le pouvoir, s’il l’a jamais été : c’est beaucoup plus crûment l’oligarchie militaire, qui a pris décidément barre sur le FLN depuis 46 ans, l’oligarchie militaire, dominante dans sa sanglante majesté, qui le détient. Quant au RCD, tous les gens normalement informés savent qu’il ne figure au mieux qu’une manière d’opposition de sa majesté : une caution laïque, présentable pour les médias français - et les naïfs qui les suivent -, de l’appareil militaire qui opprime et pille l’Algérie. Rappelons que Khalida Messaoudi, figure du RCD, qui fut l’égérie du féminisme laïque, a fini... porte-parole du gouvernement.
Benamou dénonce l’Algérie actuelle, mais il se garde bien de nommer les responsables de la terrible situation actuelle : rappelons que Pinochet a été inquiété pour 3 000 disparitions au Chili. Avec les décideurs algériens d’aujourd’hui, nous en sommes au moins à 7 200 - c’est là le nombre des dossiers constitués par la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme. Les responsables, ils sont dans la descendance de ceux qui ont réalisé par l’intimidation le coup d’État de l’été 1957 contre le FLN civil et politique issu du congrès de la Soummam. La dénonciation, chez notre dénonciateur, ne vise que des objets médiatiquement porteurs, si même elle ne cautionne pas, au mieux par le silence, les pouvoirs en place. Il révèle que, comme toute vertu, toute dénonciation à ses limites.
Pour conclure, quand notre ami Pierre Vidal-Naquet juge, comme il l’a fait dans Marianne, que le livre de G-M. Benamou est une « merde », nous sommes d’accord en cela qu’il ne fait qu’opposer un examen rigoureux et méthodique des conditions historiques qui ont présidé au déroulement du drame algérien à une vision inutilement diabolisante.
http://www.ldh-toulon.net/article.php3?id_article=694

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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [132] |
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Posté le : 28/06/2005 à 08:18 (Lu 13706 fois) | | | Le 9 juillet 1955 au Palais de la mutualité de Paris, naissait l’Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema). La guerre de libération était, alors, enclenchée 7 mois auparavant.
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Re: Patrimoine non sauvegardé [204] |
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Posté le : 14/07/2005 à 08:11 (Lu 13684 fois) | | |
Des pièces archéologique récupérées
La brigade spéciale de lutte contre le trafic illicite des biens culturels et des ½uvres d’art de la direction de la Police judiciaire (PJ) a arrêté, lundi dernier à Khenchela, une personne qui faisait dans le commerce illicite des objets archéologiques et récupéré une importante quantité de pièces d’art appartenant au patrimoine national.
Des pièces monétaires des époques romaine, punique et musulmane, des pointes de flèche ainsi que des objets d’art de valeur inestimable ont été saisis. « L’enquête sur cette affaire a commencé le mois de mai 2005 suite à une information qui nous est parvenue de cette wilaya faisant état de l’existence d’une personne qui faisait dans le commerce d’objets archéologiques. » Après deux mois d’enquête, nous avons arrêté la personne en question et récupéré les objets qui étaient en sa possession », a déclaré Darradji Salah, chef adjoint du service central de la répression du banditisme, dans une conférence de presse animée hier à Alger. Les éléments de cette brigade ont pu récupérer une quantité considérable de pièces monétaires de différentes époques historiques, dont 102 de l’empereur Constantin, 141 du IVe siècle avant J.-C., 27 pièces de monnaie françaises modernes, 4 de Dioclétien, 3 d’Arcadius et 2 pièces de Claudius. Ils ont aussi saisi 10 pointes de flèche néolithiques en silex. La valeur d’une seule pointe est de 450 millions de centimes. Parmi les objets récupérés, il y a également une colonne de marbre sculptée, des fragments de céramique et d’autres pièces d’art. La personne arrêtée, selon le commissaire, a déclaré qu’elle a ramassé certaines choses et a acheté d’autres chez des citoyens à des prix symboliques. Agé de 34 ans et d’un niveau d’instruction moyen, cet homme se connecte sur internet et avait des contacts avec des étrangers. « Il était sur le point de conclure un marché avec eux. Heureusement que nous avons découvert l’affaire à temps », a affirmé Darradji Salah. Un livre de cotation et d’identification de pièces monétaires anciennes a été également retrouvé chez lui. Preuve, d’après la police, que l’homme est un connaisseur. Est-ce que cette personne est affiliée à un réseau de trafic et de vol d’objets historiques ? Darradji Salah rétorque : « L’enquête est en cours, nous n’avons pas d’autres éléments pour le moment. » Conformément à la loi 90-04 du 15 juin 1992, interdisant le ramassage, la détention, le vol et le commerce des objets et des ½uvres d’art appartenant au patrimoine protégé, l’homme a commis une infraction. Il est poursuivi actuellement pour « détention et commerce illicite de pièces d’art historiques ». Cette affaire pose encore une fois le problème de la protection du patrimoine culturel national. La question de la protection des parcs nationaux, connus pour leur richesse en gravures et pièces archéologiques et historiques, notamment dans le Grand Sud et la région des Aurès, s’est posée avec acuité depuis l’affaire des « touristes-pillards » allemands arrêtés, il y a quelques mois, dans le Tassili n’Ajjer. Selon Darradji Salah, la PJ et la brigade spéciale de lutte contre le trafic illicite des biens culturels et des ½uvres d’art mènent, en plus de la répression, une campagne de sensibilisation à l’adresse des éléments de la police, notamment ceux des frontières. Une campagne visant à traquer les contrebandiers des ½uvres d’art, d’autant plus que celles-ci sont devenues un marché lucratif.
Bientôt la tour de Mansourah vendu sur internet ?
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Re: Patrimoine et Tlemcen [216] |
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Posté le : 15/07/2005 à 10:51 (Lu 13676 fois) | | | Le Président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a prononcé, hier, mercredi à Tlemcen, un discours à l’occasion du 50e anniversaire de la création de l’Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens (UGEMA). En voici le texte intégral :
«Chères s½urs,
Chers frères,
Mesdames, Messieurs,
L’amitié et l’affection que je voue au frère Belaïd Abdesselam, doyen des fondateurs de l’Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens, et la considération que je porte à l’½uvre nationale d’envergure ainsi qu’aux bons et mauvais moments que nous avons vécus ensemble depuis l’indépendance, m’imposent de lui rendre un hommage particulier et de lui adresser mes v½ux les plus sincères de santé, de bonheur et de longue vie, J’adresse également mes salutations aux organisations estudiantines qui se sont solidarisées avec l’UGEMA, dans des conditions difficiles, ce qui lui a permis d’occuper une place remarquable parmi les organisations d’avant-garde dans leurs pays.
Je salue aussi les honorables invités qui ont bien voulu faire le déplacement à Tlemcen et dont la présence témoigne des liens de fraternité et de solidarité agissante tissés au long de la lutte pour le triomphe des idéaux de liberté et d’indépendance. Au sein de leurs unions nationales ou internationales respectives, ils ont apporté un soutien sans relâche à leurs camarades, membres de l’UGEMA, qui avaient rejoint les rangs de la lutte pour l’indépendante. Ils ont, ainsi, porté haut les valeurs du militantisme estudiantin. A tous, nous exprimons notre plus sincères reconnaissance et notre plus profonde gratitude pour leur position courageuse dans l’histoire de la décolonisation.
Quel bonheur de revoir ses camarades de classe et ses compagnons d’armes unis dans l’amour de Dieu et de la patrie et qui ont ½uvré de toutes leurs forces à libérer leur pays de l’occupation coloniale, à effacer les séquelles de l’asservissement et de l’humiliation, à préserver notre identité et à lutter contre les fléaux sociaux qui se sont accumulés durant 132 années, soit près d’un siècle et demi. C’est toujours un bonheur de retrouver les amis et les sympathisants qui ont soutenu le peuple algérien durant sa révolution, ceux qui ont milité par le verbe ou par la plume et pris des positions dignes et honorables pour le triomphe du droit et de la justice, de la dignité de l’homme et de sa liberté et pour que prévalent les valeurs et les idéaux de l’humanité tout entière.
Bienvenue à vous tous, chers frères et amis fidèles, dans ce pays pour lequel vous avez milité, et parmi ce peuple qui vous a connus et que vous avez connu, qui vous a aimés et que vous avez aimé, vers lequel vous êtes allés et qui est venu vers vous, dans une épopée libératrice que l’homme, la terre et l’histoire ont immortalisée.
Mesdames, Messieurs,
Au moment où nous célébrons le cinquantième anniversaire de l’Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens, il me plaît d’adresser aux organisations estudiantines d’Algérie mes salutations ainsi que mon affection et ma considération, car elles représentent un grand espoir pour l’Algérie, car il est bon que les membres de l’UGEMA présents parmi nous témoignent de ce que l’Etat algérien déploie comme moyens pour l’éducation et la formation des jeunes générations.
Permettez-moi de rappeler aux représentants de l’UGEMA, qui en sont témoins tout comme le peuple algérien, les efforts considérables et les moyens gigantesques qui ont été déployés, au profit des jeunes en général, et des organisations estudiantines en particulier, pour leur formation et leur promotion depuis l’indépendance. En quarante-trois ans, notre pays a obtenu des résultats positifs très importants, grâce à une série de mesures qui l’ont complètement et radicalement éloigné de l’ère coloniale.
En dépit du triplement de sa population, notre pays a réussi à assurer des places pédagogiques à 97% de ses enfants âgés de 6 ans et 82% des 6 à 15 ans, alors que le taux de scolarisation ne dépassait pas 10% en 1954. Puisque nous célébrons aujourd’hui le cinquantième anniversaire de la création de l’UGEMA, permettez-moi de rappeler que le travail colossal qui a été réalisé par cette Union est le fruit de la volonté de quelques centaines d’étudiants seulement.
Mesdames, Messieurs,
Je voudrais que la génération actuelle soit consciente d’une réalité essentielle.
Ainsi, et partant du fait que cette génération est consciente de l’influence énorme qu’elle peut avoir aussi bien dans le développement de l’économie que dans celui de la société, l’Etat algérien a entrepris d’accorder la priorité nécessaire au secteur de l’éducation et il a mobilisé des moyens considérables pour offrir à chaque Algérien l’opportunité d’apprendre et donner au pays la possibilité de promouvoir sa véritable richesse, sa jeunesse.
Cet engagement peut être concrétisé à travers l’application d’une politique d’éducation basée sur la démocratisation et la gratuité de l’enseignement, dès l’école primaire et jusqu’à l’université, et l’affectation de plus du tiers des budgets de fonctionnement et d’équipement de l’Etat pour appliquer cette politique.
Cet effort ne s’est jamais relâché jusqu’à ce jour, malgré le niveau de l’indicible misère et de l’indescriptible frustration dont a souffert notre peuple durant la période coloniale. Il correspond aux ambitions grandioses que nourrit l’Algérie pour sa jeunesse, indépendamment des exigences qu’impose la compétitivité dans un environnement régional et international chaque jour plus âpre et impitoyable.
Les résultats obtenus à travers l’application de cette politique constituent véritablement une source de fierté et d’orgueil pour tous les Algériens et les Algériennes.
Les motifs de satisfaction et de contentement se sont multipliés avec la scolarisation de 8 millions d’enfants dans plus de 23.000 établissements, avec 800.000 étudiants universitaires et bien plus d’un million d’étudiants en 2008 alors qu’il n’y en avait que 600, une seule cité universitaire à l’indépendance contre 110 en 1999 et 200 actuellement.
J’ai des appréhensions en ce qui concerne ce que nous devons faire pour que, avant l’année 2008-2009, nous ajoutions aux 23.000 cadres universitaires actuellement en poste, 23.000 autres. Comment résoudre ce problème alors que le réseau d’établissements universitaires s’étend déjà sur 41 villes, comprenant 56 établissements dépendant de 27 universités et desservis par 13 centres universitaires que nous ambitionnons de voir englober le plus grand nombre possible de wilayas, sans parler des 34 autres établissements de formation supérieure, soit 13 centres universitaires, 12 écoles et instituts nationaux, 4 écoles normales supérieures et 5 annexes universitaires, de l’algérianisation du corps enseignant à tous les niveaux, de l’attention toute particulière accordée à l’amélioration constante de son niveau professionnel, de l’ouverture de notre système éducatif sur les autres cultures, de l’ouverture de nos universités sur les sciences et les technologies modernes, sur l’économie et la société, ainsi que sur le monde extérieur.
En résumé, dès les premières années de l’indépendance, nous avons scolarisé un nombre d’enfants algériens supérieur au total de tous les enfants scolarisés pendant 132 années de présence coloniale. Ce faisant, nous avons pris le relais et poursuivi le processus qu’avait élaboré l’Emir Abdelkader pour édifier un Etat algérien sur des bases nationales et modernes, processus qui n’a pu parvenir à sont terme en raison des vicissitudes de l’histoire.
Mesdames, Messieurs,
Il m’est agréable d’être aujourd’hui à Tlemcen pour commémorer avec vous et avec tout le peuple algérien et en particulier son ’intelligentsia’, la création de l’Union Générale des Etudiants Musulmans Algériens, l’UGEMA, il y a cinquante ans, le 4 juillet 1955 à Paris, au moment où les forces vives de la nation entamaient le combat décisif, notre guerre de libération nationale, sous la direction du Front de Libération Nationale et de l’Armée de Libération Nationale.
Vous comprendrez qu’à l’évocation de ces sigles, de ces lieux, de ces dates qui ont façonné activement ma destinée de militant politique qui, à l’instar de beaucoup d’autres, passionnés d’histoire et de culture, a quitté délibérément ses ’chères études’ pour rejoindre les rangs de l’Armée de Libération Nationale et participer au combat de son peuple, de puissantes émotions se réveillent en moi, faites de fierté et de confiance inébranlable dans la cohésion de notre nation et dans le rôle fondamental de nos intellectuels d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Je ne vous cacherai pas qu’à cette émotion se mêle un sentiment de profonde tristesse face aux convulsions multiples, économiques, politiques, culturelles que notre pays a connues dans la dernière décennie du 20e siècle et dont il commence à se relever. Ce sentiment de profonde tristesse que vous êtes, sans doute, nombreux à ressentir aussi, ne doit pas être confondu avec un quelconque abattement ou, pis encore, avec du défaitisme. La crise que nous avons traversée n’a pas ébranlé notre nation ni désagrégé notre société.
Portant encore de profondes cicatrices et souffrant de ses douloureuses déchirures, notre nation, plus diverse mais plus unie que jamais, aspire désormais à revenir à la vie et à reprendre sa place dans le monde. Elle le peut, elle le doit, avant même d’avoir pansé toutes ses blessures. S’il y a un génie national algérien, il réside d’abord et avant tout, dans la capacité de notre peuple à transformer ses faiblesses en force motrice, et à transmuter le malheur en énergie positive. Ce génie national est le produit de la combinaison d’un attachement au principe islamique de ’patience’ et d’une longue expérience historique de préservation de toute destruction démographique, économique, culturelle, au cours des 132 ans d’une domination impitoyable.
C’est la raison pour laquelle, au fur et à mesure que je vous parle, ma tristesse s’estompe, pour laisser place à la fierté du rappel des combats d’hier, et à l’espoir que nos combats d’aujourd’hui réussiront à faire émerger une société instruite et attachée à sa culture, une société à la fois industrieuse et ouverte, une société dans laquelle l’unité se conjugue avec la diversité, et où l’autorité de l’Etat est fondée d’abord sur la confiance de la collectivité nationale, une société paisible, mais prête à l’autodéfense, une société dynamique, dans laquelle l’islam conforte les bases de notre civilisation et encourage la curiosité scientifique et technologique, une société ouverte au monde, vivant son temps, mais à son rythme propre, dans le cadre de ses valeurs et de ses traditions millénaires.
C’est avec cet espoir que je m’adresse aujourd’hui à vous. Un avenir immédiat de mieux-être collectif et individuel est possible pour notre peuple. Il est nécessaire pour cela de mobiliser l’effort, le dévouement de toutes les institutions et de toutes les composantes de notre société, et en particulier de nos intellectuels dont le rôle est d’une importance cruciale dans la représentation qu’une société se fait de son passé, de son présent et de son avenir.
A deux reprises, à deux moments décisifs de notre histoire, les intellectuels algériens et le mouvement estudiantin ont joué un rôle de premier plan dans la cristallisation d’une conscience nationale unifiée et dans la modernisation de notre peuple malgré leur petit nombre et la terrible pesanteur de la domination coloniale.
La création de l’UGEMA, en juillet 1955, est un moment lumineux de l’histoire de notre mouvement national et de notre guerre de libération nationale. Les intellectuels et les étudiants d’aujourd’hui doivent savoir qu’à l’époque, les étudiants algériens de l’Université d’Alger et des autres universités françaises n’étaient que quelques centaines, tout au plus, moins d’un millier, en tout cas principalement concentrés dans les facultés de droit et de médecine.
Encore faut-il rappeler qu’à la charnière du 19e siècle et du 20e siècle qui marque l’apogée de la déstructuration de notre société par la France coloniale, on comptait à peine quelques dizaines d’étudiants algériens surnageant à la surface d’un océan d’analphabétisme. La puissance coloniale avait en effet réussi à détruire en grande partie le dense réseau scolaire qui existait dans les villes comme dans les campagnes algériennes en 1830. Les officiers de l’Armée française de l’époque ont témoigné de leur étonnement devant les niveaux de scolarisation bien supérieurs à ceux des provinces françaises.
Il est clair que pour la société algérienne, la colonisation française a été massivement une entreprise de dé-civilisation. Aussi, est-il difficile de ne pas être révolté par la loi votée par le parlement français le 23 février dernier et qui représente une cécité mentale confinant au négationnisme et au révisionnisme. Je comprends l’indignation et la colère que l’apologie de la ’mission civilisatrice’ du colonialisme a suscitée auprès de beaucoup de nos concitoyennes et concitoyens.
Je me dois de dire cependant que je ne partage pas totalement leur surprise, car il faudra du temps, beaucoup de temps, des générations sans doute pour que la société française se réconcilie avec sa propre histoire et apprenne à respecter les civilisations des autres peuples et à cohabiter avec elles.
L’important, pour nous, ne réside pas dans les lois que se donne la représentation nationale française, son contenu fût-il blessant pour la plupart d’entre nous. Nous devons rester circonspects face aux discours que les sociétés de la rive Nord tiennent depuis trois siècles sur elles-mêmes et sur le monde.
Nous devons refuser le mimétisme et l’occidentalisme, non pas pour rejeter en bloc ce qui est occidental, mais pour y puiser tout ce qui peut nous aider à nous moderniser dans le domaine de la science et de la technique comme le recommande l’Emir Abdelkader dans sa ’ Lettre aux Français’.
La France coloniale n’a jamais voulu partager avec le peuple algérien sa supériorité dans le domaine scientifique malgré les propositions pressantes et généreuses de l’Emir Abdelkader, du capitaine Khaled, et de deux des trois hommes phares de notre mouvement national : cheikh Abdelhamid Ben Badis et Ferhat Abbas.
Il est inutile, et peut-être naïf, de lui en faire reproche aujourd’hui, sachant les objectifs véritables de la politique de colonisation. Mais il est nécessaire de réaffirmer que, si notre pays est prêt à signer avec l’Etat français un traité de paix et d’amitié sur la base de l’égalité des nations et de la complémentarité de nos intérêts, il ne saurait en aucun cas cautionner, même par son silence, une prétendue mission civilisatrice du colonialisme qui reste pour nous et pour tous les peuples colonisés de la planète l’un des plus grands crimes contre l’humanité que l’histoire a connus.
Il appartient à la société française de se libérer des relents d’un passé attentatoire à la dignité humaine et qui, bien que s’affaiblissant au fil des ans, se manifeste maintenant comme le fantasme d’une puissance perdue, et semble-t-il regrettée par les nostalgiques de la domination coloniale. L’Algérie tend aux Françaises et aux Français de bonne volonté une main fraternelle pour relever ensemble les défis du futur et en finir avec le temps du colonialisme et de la prétention universaliste de l’occident.
Les premiers intellectuels algériens de cette période charnière de la fin du 19e siècle début du 20e issus des lycées, des medersas et des universités françaises, mais aussi des universités islamiques de la Qaraouiyine, de la Zitouna et d’El Azhar, ont pris conscience des dangers représentés par la politique de dépersonnalisation poursuivie par les autorités coloniales. Quelles que soient leurs filières de formation et leurs langues de travail, ils ont décidé d’unir leurs efforts pour préserver l’identité islamique du peuple algérien et relever le défi lancé par le colonisateur dont la politique de scolarisation ne visait qu’à lui fournir le personnel nécessaire au fonctionnement de l’Etat colonial, et éventuellement quelques ’indigènes de service’ chargés de faire son apologie.
A la veille de la première guerre mondiale, l’Algérie musulmane comptait seulement 240 instituteurs, 40 bacheliers, 25 avocats et médecins. L’épopée de l’Emir Abdelkader n’est plus qu’un souvenir glorieux et douloureux. Le temps des grandes insurrections à base tribale et confrérique est fini et avec lui celui de l’ancienne intelligentsia citadine ou rurale qui, par pans entiers, a été détruite ou s’est exilée dans d’autres pays musulmans.
Pourtant cette poignée d’hommes va être à l’origine du mouvement de résistance du peuple algérien dont l’histoire arrête de dériver malgré son présent sombre et son avenir bouché par un rapport de forces par trop inégal. Avec patience et audace, ils vont jeter les bases d’une société civile algérienne qui finira par être largement autonome de l’Etat colonial. C’est pendant cette période qu’apparaissent dans toutes villes et villages d’Algérie, des associations culturelles, des sociétés d’entraide et de bienfaisance qui ont toutes en commun la référence à l’islam, à ses symboles, à ses figures emblématiques et une volonté farouche de moderniser la société. C’est aussi pendant cette période que se met en place une presse algérienne, le plus souvent bilingue.
Je veux rendre aujourd’hui un hommage respectueux à ces hommes oubliés par notre histoire des années trente, mais sans lesquels notre mouvement politique nationaliste n’aurait sans doute pas vu le jour avec la même force et la même capacité de mobilisation. Leurs noms sont souvent inconnus du grand public, sortis de notre mémoire collective. Citons au moins le docteur Ben Larbey à Alger, le docteur Morsly à Constantine, Si M’hamed Ben Rahal à Nedroma, Ibrahim Bayyoud au M’zab, les journaux El Misbah et El Hack dont les principaux rédacteurs sont souvent des étudiants, sans oublier les ’intellectuels du certificat d’études’, qui furent la cheville ouvrière de la diffusion de notre culture nationale dans l’Algérie dominée.
La création de l’Association des Etudiants Musulmans de l’Afrique du Nord en 1919 à Alger et celle de l’Association des Etudiants Musulmans Nord-africains en France en 1927 à Paris constituent un moment important dans la formation d’une conscience collective estudiantine qui refuse le ’miroir aux alouettes’ de l’assimilation à titre individuel et se met au service de la renaissance nationale des peuples musulmans du Maghreb.
J’ai tenu à commémorer le cinquantième anniversaire de la création de l’UGEMA, avec vous, et sur votre proposition, à Tlemcen, parce que c’est dans cette ville, ancienne capitale des Zianides, dynastie amazigh arabisée par l’islam, que s’est tenu le 5e congrès des Etudiants Musulmans Nord-Africains, il y a 70 ans. Par les modalités de son déroulement, ce 5e congrès organisé du 6 au 10 septembre 1935 manifeste le degré de maturité atteint par le mouvement étudiant algérien en tant que vecteur d’unification de l’intelligentsia algérienne dans toutes ses composantes et son rayonnement social et culturel de plus en plus important.
A ce cinquième congrès ont participé des délégations venues des universités françaises mais aussi de la Zitouna de Tunis et de la Qaraouiyine de Fès. Plus d’un millier de personnes ont assisté à la séance inaugurale dans la salle de la mairie avec la participation de cheikh Bachir El Ibrahimi, vice-président de l’Association des Oulémas Musulmans Algériens et responsable de la Medersa de ’Dar El Hadith’. Bien que le mot d’ordre ’d’indépendance’ n’ait été prononcé par aucun des participants, la tonalité de cette séance inaugurale a été caractérisée par l’attachement multiforme à l’islam et la volonté ferme de modernisation. Cela a été suffisant pour que le maire interdise aux congressistes l’utilisation de la salle qui leur avait été préalablement accordée. Les travaux du 5e congrès se sont poursuivis dans les locaux du cercle culturel Essaâda avec l’assistance matérielle et l’hospitalité de la population de Tlemcen.
Je ne rappelle pas ces faits uniquement pour faire plaisir aux Tlemcenniennes et aux Tlemceniens présents dans cette salle ni par souci de détail historique. Je les rappelle pour dire une nouvelle fois que si nous avons conquis notre indépendance par la force des armes, nous ne devons pas sous-estimer le lent et patient travail de ressocialisation culturelle accompli par des générations d’intellectuels en nombre réduit et en butte aux tracasseries et à la répression du pouvoir colonial.
Il est faux de dire que les intellectuels dans leur tendance centrale se soient marginalisés ou aient été marginalisés au cours de la longue histoire de notre mouvement de renaissance nationale.
Bien au contraire, et malgré leur nombre réduit, ils sont représentés dans toutes les instances de notre société, y compris dans les partis politiques, surtout à partir de la seconde guerre mondiale. Une partie de l’encadrement de l’UDMA, du PPA-MTLD est en grande partie assuré par des étudiants ou des intellectuels issus des universités françaises, des medersas et des Universités islamiques tunisienne et égyptienne.
La création de l’UGEMA, il y a cinquante ans, représente un saut qualitatif dans l’organisation et les perspectives du mouvement étudiant algérien, mais c’est, avant tout, le résultat d’un long processus de participation active et souvent décisive des étudiants et des intellectuels algériens à la renaissance de leur société, de leur peuple, de leur nation.
Depuis notre indépendance, il est devenu coutumier de donner plus d’importance à la célébration du 19 mai 1956, date de la grève des étudiants, qu’à celle du 4 juillet 1955, date de la création de l’UGEMA. Il est vrai que la proclamation de la grève illimitée des cours, l’appel à «déserter les bancs de l’Université pour le maquis» et à «rejoindre en masse l’Armée de la Libération Nationale et son organisme politique, le FLN», par sa radicalité et sa charge patriotique, a de quoi enflammer les enthousiasmes juvéniles.
Il est vrai par ailleurs que, par centaines, certains avant même l’appel du 19 mai, étudiants et étudiantes, lycéennes et lycéens avaient rejoint les maquis dans un mouvement de véritable ’levée en masse’, beaucoup d’entre eux mourront les armes à la main ou assassinés dans les geôles colonialistes. Au même titre que les autres catégories sociales, les intellectuels et les étudiants ont payé le prix du sang pour que le peuple algérien impose à l’Etat colonial français son droit à l’indépendance nationale.
En ce moment solennel où nous nous retrouvons pour célébrer le cinquantième anniversaire de la création de l’UGEMA, dans le cadre de l’année du cinquantenaire du déclenchement de la Révolution Nationale Algérienne du 1er Novembre 1954, il est de notre devoir d’évoquer et de saluer la mémoire de tous les membres de l’UGEMA, ceux qui sont tombés au combat sur le champ de bataille de notre guerre de libération nationale, comme ceux qui ont perdu la vie, par suite des mesures répressives meurtrières exercées par les forces colonialistes contre les militants du FLN.
Il est difficile de nommer, aujourd’hui, toutes les étudiantes et tous les étudiants, qu’ils soient universitaires, lycéens ou collégiens, dont les noms s’inscrivent dans le long martyrologe attaché à notre lutte de libération nationale. Qu’il me soit permis, au moins, de citer les noms de ceux, parmi eux, qui se sont distingués par leur rôle dans le déploiement de notre mouvement étudiant et qui se sont illustrés par leur conduite au sein de l’ALN ou par leur attitude face à la répression de l’oppresseur colonial.
Etant à Tlemcen, comment ne pas évoquer immédiatement l’un des enfants de cette ville, Ben Ali Boudghène, plus connu sous le nom de Colonel Lotfi.
Après tous ses exploits, nommé colonel, chef de la Wilaya V, il tomba au combat, au moment de traverser la frontière algéro-marocaine, sur le chemin du retour à l’intérieur de la Wilaya dont il avait la charge et afin d’en assumer le commandement directement sur place.
Bien d’autres perdirent encore la vie en accomplissant leurs missions ou bien en prenant part aux accrochages avec l’ennemi. Ce fut le cas de Allaoua Benbatouche, originaire de Batna, l’un des pionniers de notre mouvement étudiant, ancien vice-président de l’AEMAN et ancien membre du comité directeur de l’UGEMA. Affecté dans l’ALN en Wilaya II, il y gravit les échelons de la hiérarchie et reçut le grade de commandant. Parti en mission à Tunis, il périt sur le barrage électrifié de l’Est, au moment où il réintégrait l’intérieur de sa wilaya.
Mohamed Madhi, originaire de Souk-Ahras et l’un des premiers étudiants membres actifs du FLN en France, arrêté et interné dans un camp en Algérie. Il fut enlevé par la police française après son élargissement du camp d’internement. Il disparut, sans que le lieu de son inhumation fût révélé aux siens. Il fut l’un des promoteurs les plus engagés de l’UGEMA. Mohamed Taouti, natif de Laghouat, plus connu sous le nom de Commandant Chabane dans la Wilaya V où il fut affecté et y mourut au combat. Abdelhamid Lamrani, l’un des proches collaborateurs de Mostafa Benboulaïd, il perdit la vie à la suite de l’explosion d’une bombe en même temps que Mostafa Benboulaïd qui avait pris la direction des opérations déclenchées le 1er novembre 1954. Deux frères de Abdelhamid Lamrani perdirent également la vie pendant la guerre de libération nationale.
Rachid Amara, l’un des premiers militants étudiants du FLN à Alger, trouva la mort au combat dans la Wilaya IV, en compagnie d’un autre militant étudiant de la première heure, Mohamed Lounès. Mekki Hihi, l’un des pionniers de l’association de la jeunesse estudiantine musulmane de Constantine et l’un des cadres les plus en vue de la Wilaya I où il trouvera la mort pendant un accrochage avec l’armée ennemie. Abdelkader Belarbi, originaire de la région de Mostaganem, membre dirigeant de l’AEMAN puis de l’une des sections de l’UGEMA, revenu de Paris où il poursuivait ses études tout en assumant des responsabilités au sein de l’UGEMA, il avait rejoint l’ALN dans la Wilaya V d’où il fut muté dans la Wilaya IV où il devient un proche collaborateur du Colonel Si M’Hamed, il périt en Wilaya IV au cours d’une bataille opposant l’ALN à l’armée française. Brahim Tirichine, originaire de Ghardaïa, membre actif de l’AEMAN et de l’UGEMA à Alger, il disparut au cours d’opérations opposant l’ALN à l’armée française dans la Wilaya IV.
Hassiba Benbouali, lycéenne d’Alger, perdit la vie héroïquement dans le cadre des attaques menées par les parachutistes français contre les structures des fidaîs de la Zone Autonome d’Alger. Abderrahmane Taleb, qui perdit la vie sous le couperet de la guillotine française dont on connaît l’hécatombe qu’elle provoqua dans les rangs du FLN et de l’ALN, en Algérie comme en France, durant notre guerre de libération. Les frères Belhocine, tombés dans la Wilaya III. Mamoun Mekkioui, plus connu des moudjahidine de la Wilaya V sous le nom de Si Abderrahmane, l’un des pionniers de notre mouvement étudiant et l’un des défenseurs actifs de notre culture arabo-islamique, il mourut au cours d’un combat avec l’armée ennemie. Ahmed Inal, étudiant venu de Paris prendre part à notre lutte de libération, perdit la vie à la suite d’opérations menées par l’armée française.
On ne peut oublier de citer le sacrifice de Tahar Ben M’hidi, frère de Si Larbi, l’un des fondateurs du FLN et l’un des responsables du déclenchement de notre Révolution armée, comme il serait bon, également, de réserver une pensée au jeune étudiant Abdelhak Kouissem emporté en Wilaya II, par une balle tirée par l’ennemi deux heures à peine avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu décidé pour le 19 mars 1962.
Que Dieu les accueille tous en son vaste paradis et que leur sacrifice reste à jamais gravé dans nos mémoires moins comme une blessure douloureuse que comme une invitation pressante à continuer le travail de libération qu’ils ont initié au prix de leur vie. L’importance de l’action de l’UGEMA réside d’abord dans le fait d’avoir fait basculer le mouvement étudiant algérien et avec lui la plus grande partie des intellectuels sur les positions du FLN-ALN et de mettre une nouvelle fois en échec la stratégie coloniale visant à isoler les intellectuels algériens du reste du peuple. Cinquante ans après la faillite de l’assimilation proposée à titre individuel à quelques dizaines d’intellectuels, la tentative de transformer quelques centaines d’étudiants en ’troisième force’ destinée à contrer le FLN, connaissait, elle aussi, un échec.
L’importance de la création et de l’action de l’UGEMA réside ainsi dans la clarification idéologique qu’elle opère dans les rangs du mouvement étudiant algérien et dans le travail de conception et d’organisation que ses membres vont accomplir dans les rangs du FLN-ALN au niveau des Wilayas, de l’état-major et du GPRA.
Au moment de la création de l’UGEMA, un débat intense a partagé le mouvement étudiant algérien en particulier à Paris sur l’opportunité de mentionner le ’M’ de musulman dans le sigle de la nouvelle organisation. Une minorité d’étudiants voulaient en effet constituer une organisation regroupant indistinctement étudiants algériens et étudiants de la minorité coloniale autour d’un projet de ’nation algérienne en formation’ négateur de l’ancrage historique culturel de la nation algérienne. En menant leur combat idéologique sans concession, les initiateurs de l’UGEMA ont épargné au mouvement étudiant algérien et à l’ensemble de notre mouvement national engagé dans une guerre sans merci, une dérive dont les conséquences auraient pu être catastrophiques. Qu’ils en soient aujourd’hui tous félicités et sincèrement remerciés.
L’importance de l’action des étudiants dans les maquis, dans les villes ou dans les bases frontalières ne témoigne pas seulement de leur héroïsme et de leur capacité à affronter la mort avec courage et bravoure. Certains ont été de brillants chefs de guerre, mais ils ont le plus souvent été les agents modestes et efficaces d’une modernisation accélérée des structures du FLN-ALN et de la société algérienne en général.
A la veille de l’indépendance, il n’était pas excessif de dire que l’UGEMA a rempli magnifiquement sa mission. Elle a articulé intelligemment et efficacement le mouvement étudiant sur l’ensemble du mouvement national, en étant présente à tous les niveaux des structures politico-militaires de notre révolution nationale. Ainsi, et à deux reprises dans l’histoire tourmentée et héroïque de notre nation, nos étudiants, et la grande majorité de nos intellectuels, ont joué un rôle décisif dans notre renaissance nationale.
Aujourd’hui notre nation meurtrie par plus d’une décennie d’un terrorisme inqualifiable, a besoin à nouveau de l’intelligence du c½ur et de la raison de ses étudiants, de ses intellectuels pour se redresser et se reconstruire.
En quarante ans d’indépendance, notre pays a accompli des mutations positives colossales qui l’ont définitivement éloigné de son passé colonial. Malgré un triplement de sa population, l’Algérie a réussi à scolariser la quasi-totalité de ses enfants. Puisque nous commémorons aujourd’hui le cinquantenaire de la création de l’UGEMA, permettez-mois de redire que l’immense travail accompli par elle a été le fait de quelques centaines d’étudiants alors qu’au moment où je vous parle plus de 800.000 étudiants s’apprêtent à boucler leur année universitaire.
Cependant, l’instruction généralisée et l’essor très rapide de notre population universitaire n’ont pas produit une culture nationale créative, diversifiée et unifiante malgré de nombreuses tentatives individuelles que je salue chaleureusement.
L’Algérie, j’en ai la conviction, est au seuil d’une phase nouvelle de son histoire, la troisième en fait en un siècle et, une fois de plus, le moteur de son évolution réside principalement dans le facteur culturel, beaucoup plus que dans l’économie ou même que la politique.
Il est des moments dans l’histoire des peuples où le possible devient réel non pas par le jeu des déterminismes économiques et institutionnels mais par une mutation des mentalités qui réorganise en profondeur le champ des pratiques et des représentations sociales. Le projet de réconciliation nationale que j’ai l’intention de présenter sous ses multiples facettes au peuple algérien vise d’abord à induire une telle mutation des mentalités rendant impossible toute nouvelle déchirure de notre société.
Pour cela il est impérieux d’en finir avec la guerre symbolique des référents. Dans ses profondeurs, notre société aspire à la modernisation sans occidentalisation comme elle reste attachée à l’Islam sans Etat
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A retenir
En dépit du triplement de sa population, notre pays a réussi à assurer des places pédagogiques à 97% de ses enfants âgés de 6 ans et 82% des 6 à 15 ans, alors que le taux de scolarisation ne dépassait pas 10% en 1954.
Les motifs de satisfaction et de contentement se sont multipliés avec la scolarisation de 8 millions d’enfants dans plus de 23.000 établissements, avec 800.000 étudiants universitaires et bien plus d’un million d’étudiants en 2008 alors qu’il n’y en avait que 600, une seule cité universitaire à l’indépendance contre 110 en 1999 et 200 actuellement.
En résumé, dès les premières années de l’indépendance, nous avons scolarisé un nombre d’enfants algériens supérieur au total de tous les enfants scolarisés pendant 132 années de présence coloniale. Ce faisant, nous avons pris le relais et poursuivi le processus qu’avait élaboré l’Emir Abdelkader pour édifier un Etat algérien sur des bases nationales et modernes, processus qui n’a pu parvenir à sont terme en raison des vicissitudes de l’histoire.
A la veille de l’indépendance, il n’était pas excessif de dire que l’UGEMA a rempli magnifiquement sa mission. Elle a articulé intelligemment et efficacement le mouvement étudiant sur l’ensemble du mouvement national, en étant présente à tous les niveaux des structures politico-militaires de notre révolution nationale. Ainsi, et à deux reprises dans l’histoire tourmentée et héroïque de notre nation, nos étudiants, et la grande majorité de nos intellectuels, ont joué un rôle décisif dans notre renaissance nationale.
L’Algérie, j’en ai la conviction, est au seuil d’une phase nouvelle de son histoire, la troisième en fait en un siècle et, une fois de plus, le moteur de son évolution réside principalement dans le facteur culturel, beaucoup plus que dans l’économie ou même que la politique.
Dans ses profondeurs, notre société aspire à la modernisation sans occidentalisation comme elle reste attachée à l’Islam sans Etat théocratique. Il appartient aux millions d’intellectuels formés depuis quatre décennies d’engager un mouvement de réflexion, de création et d’action pour répondre aux attentes de leur société. Alors, l’Algérie rebondira et étonnera à nouveau le monde.
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [608] |
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Posté le : 10/09/2005 à 09:16 (Lu 13579 fois) | | | Il y a de cela 70 ans... TLEMCEN 6-10 septembre 1935
Cinquième congrès de l’ Association des Etudiants Nord-Africains Musulmans
Par Mohammed BAGHLI Ingénieur-Consultant En Patrimoine Immatériel
Les autorités de l’époque s’étaient invitées à l’ouverture du Congrès pour passer leur message par la voix du maire de Tlemcen dans la salle des fêtes de la Mairie.
Cette salle se dressait en lieu et place de l’ancienne Médersa Et-Tachfiniya, qui s’étendait entre la Grande Mosquée de la ville et la muraille nord du Méchouar, et qui fut complètement détruite en 1873 pour y ériger une mairie coloniale et une place pour le bal du 14 Juillet de chaque année, en face des principales sorties de la Grande Mosquée.
Elle était l’une des cinq plus célèbres médersas de Tlemcen.
* La Médersa Tachfiniya s’appelait aussi Médersa du Grand Palais et fut inaugurée en 720 H. (1320 G.) par un cours célèbre de l’Imam savant de l’époque Aby-Moussa Imran Al-Mecheddaly, mort en 745 H. (1344 G.). Cette médersa était un joyau en son genre et fut appelée aussi la «Nouvelle Médersa».
* La Médersa de Sidi Belahcène Et-Tenessy fut ouverte en 896 H. (1296 G.) pour les cours d’Abyl-Hacène Et-Tenessy, frère du très célèbre Abou Ishaq Ibrahim Et-Tenessy, le plus consulté durant le 7e siècle hégirien, soit le 13e siècle chrétien. Elle fut transformée en 1846 en grange pour fourrage de l’armée coloniale, puis en musée de sauvegarde de pièces rares de Tlemcen, non transférées ailleurs.
* La Médersa des Frères Oulad Al-Imam, première institution d’enseignement supérieur privé au Maghreb Central, dont il ne reste que la mosquée jointe, qui fut ouverte en 707 H. (1310 G.) par les frères Abderrahmane Aby Zeid, Cheikh de l’Ecole Malékite de Tlemcen; et Issa Aby Moussa, le maître d’Al-Abouly. Elle s’appelait la «Médersa ancienne», par rapport à la Tachfiniya, la Médersa Nouvelle.
* La Médersa Al-Yaqoubiya d’Abou-Hammou Moussa II, près de la mosquée de Sidi Ibrahim Al-Masmoudy, et la mosquée-école de Sidi Bou-Abdallah. Elle fut inaugurée un 14 novembre 1363 G. pour les cours restés célèbres d’Aby-Abdallah Ech-Chérif et-Tilimsany.
* Quand à la Médersa d’Al-Eubbad, où enseigna Abderrahman Ibn-Khaldoun, elle fut inaugurée en 748 H. (1347 G.).
Et voilà qu’en ce 6 septembre 1935, des étudiants maghrébins reprenaient leur place dans une de leurs université d’antan. Ils sont venus de la Zeiytouna de Tunis, de la Quaraouiyine de Fès, d’Alger, de Constantine, de Béjaïa, de Biskra, même s’ils se sont retrouvés dans des universités de France ou d’Alger, Rabat ou Tunis. La délégation tunisienne, présidée par M. Habib Thameur, comprenait MM. Allal Belahouène, Al-Moundji Slim, les Professeurs En-Nifer et Othman Al-Ka’ak. La délégation marocaine était présidée par Abdel-Khalaq Torrès, représentant personnel de M. Allal Al-Fassi, qui avait offert son intervention en poème pour la séance d’ouverture, et comprenait M. Mohammed Ibrahim Al-Kattani et d’autres.
Parmi les nombreux participants du territoire algérien, il y avait MM. Abderrahmane Yacine, Mohammed Al-Aïd Al-Khalifa, Moufdi Zakaria et bien d’autres.
Les organisateurs du Congrès à Tlemcen se comptaient parmi les animateurs des Cercles musulmans culturels tels Nadi Es-Saada, En-Nadi Al-Islami, Nadi Ech-Chabiba, Nadi Er-Raja, l’Association des Oulémas et quelques notabilités de la ville. Les militants du Mouvement National assuraient la logistique d’hébergement, de restauration et de prise en charge des invités.
Après l’ouverture du Congrès par Cheikh Al-Bachir Al-Ibrahimi, la parole fut donnée au Maire de Tlemcen. M. Valleur s’évertua avec éloquence dans sa langue à attirer l’attention des congressistes sur la non-faisabilité d’un Maghreb uni et d’inviter les participants à visiter les ruines de Mansourah pour méditer sur l’unité du Maghreb et sur le rôle de la présence de la France dans les pays d’Afrique du Nord !
M. Allal Belahouène, qui assurait la traduction du français vers l’arabe, prit la parole dans la langue de M. le maire pour décrier les effets de la colonisation française et rappeler ce que fut la
civilisation du Maghreb aux XIVe et XVe siècles en sciences, en commerce et en tolérance, alors qu’en France se dressait une potence devant chaque église !
Puis le jeune Boumediène Ech-Chaffai Moulessehoul, étudiant Azhari de Tlemcen, se leva et, en langue arabe, enflamma l’assistance à un point tel que les autorités de la ville décidèrent d’interdire l’utilisation de la salle des fêtes de Tlemcen pour la poursuite de la tenue du 5e Congrès des Etudiants Nord-Africains Musulmans.
C’est alors que les militants de Nadi Es-Saada et du Nadi Al-Islami offrirent leurs services pour la poursuite du Congrès dans leurs locaux.
- Unité et solidarité maghrébine.
- Généralisation et développement de l’enseignement en langue arabe dans les pays maghrébins.
- Lutte contre l’ignorance, l’intolérance et les fléaux sociaux.
Les recommandations du 5e Congrès des Etudiants Nord-Africains Musulmans
Parmi les recommandations du 5e Congrès des Etudiants Nord-Africains Musulmans tenu à Tlemcen du 6 au 10 septembre 1935:
1. La langue arabe est la langue officielle des pays du Maghreb.
2. L’enseignement de la langue arabe est obligatoire dans les écoles primaires et secondaires.
3. Préparer les enseignants de la langue arabe en élevant leur niveau de formation.
4. Enseignement de la littérature arabe en parallèle à la littérature française dans le secondaire.
5. Préparer les programmes d’éducation nationale.
6. Libération de la femme et assurer sa formation.
7. Enseignement de l’Histoire du Maghreb et retour aux traditions et coutumes musulmanes.
8. Amélioration du statut des enseignants.
Les recommandations étant rédigées, un des animateurs pédagogiques du Congrès, Cheikh Al-Hadi Es-Senoussy, s’est posé à haute voix la question de l’exécution de ces recommandations, en rappelant que l’Association des Oulémas avait discuté ces points et proposé ces solutions mais tous ses travaux sont restés «encre sur papier !!».
Du fond de la salle, une voix s’est élevée pour scander en toute assurance: «Eth-thaoura ! Eth-thaoura ! Et-thaoura !». Le jeune homme qui venait de proposer la solution était un étudiant à la Zeiytouna, le poète du chant national algérien, Moufdi Zakaria. Il déclama ensuite un poème d’amour entre les trois pays du Maghreb intitulé: «Inna Al-Djazaïr fil gharami wa Tounousa wal Maghriba Al-Aqça khouliqna sawa». La soirée fut enrichie par les interventions de Cheikh Bachir Al-Ibrahimi, du Professeur Othman Al-Ka’ak et du jeune Boumediène Ech-Chaf’i Moulessehoul.
En parallèle, fut célébré le premier anniversaire de la mort du grand poète tunisien Aboul-Qacem Ech-Chabbi par des interventions de Moufdi Zakaria, Mohammed Al-’îd Al-Khalifa et d’autres poètes présents à ce Congrès. Le poème de l’Association fut entonné à plusieurs reprises. Il était de la composition de Moufdi Zakaria et de Moundji Slim: «Hayyou Ifriqiya Hayyou Ifriqiyya Hayyou Ifriqiyya Ya ‘Ibâd !
Chamalouha yabghi Al-Ittihad Achbalouha Taeba Al-Idtihad !
Ayna Rouma wa dahaha wa isti’mariha alladoud !
Ayna Ispanya wa ladhaha wa salibiha al haqoud !
Qad mazzaqna Aghlalaha wa staqallat minha Al-Bilad».
Tous les jeunes militants du Mouvement National de Tlemcen s’approchèrent de celui qui avait déjà acquis l’assurance de la Jeunesse destourienne et s’était engagé dans le Mouvement National Algérien dans le Parti de l’Etoile Nord-Africaine en adhérant pleinement à l’approche de son fondateur, Messali Hadj. Il ne tarissait pas de leur réciter les poèmes les plus célèbres sur l’Histoire de Tlemcen: Ibn-Khamis, Al-Quiçiy, Et-Talalissy, Ibn-Khaldoun, Ibn-Merzouk...
On lui fit visiter les sites mentionnés dans ses poèmes. Il aimait s’exclamer sur les espaces de Sidi Abdallah d’Al-Ba’al, sur les hauteurs Est de Tlemcen, et suivait du regard le parcours du canal Saquiet Er-Roumi qui longeait les jardins et moulins de Tlemcen.
C’est là que fut inspiré le chant «Min Djibalina tala’a saout Al-Ahrar younadina». C’est là que fut entonné pour la première fois, au mois de Ramadhan de 1937, le premier chant national «Fida’ Al-Djazaïr rouhi wa mali Ala fi sabili Al-Hourria» avec son refrain célèbre «Ala fi sabili Al-Istiqlal; Ala fi sabili Al-Hourria !», de la composition de Moufdi Zakaria, inspiré de l’Appel du 12 Novembre 1936 du Président du Parti du Peuple Algérien à la généreuse Nation algérienne.
Il ne savait pas non plus que quarante années après, en juillet 1975, à l’occasion du IXe Séminaire sur la Pensée Islamique, il quittera à jamais son pays à partir de ces lieux, en composant un des plus beaux poèmes jamais scandé sur Tlemcen: «Amdjadouna tatakellem !», avec le refrain: «Maghna Tilimsan Al-Aman Al-Aman fa ayna minni fiki sihroul bayan; Mahma samâ ach-chi’rou wa mahma rtaqâ fa anti fawqa ch-chi’ri yâ Tilimsan». Ce poème est daté du 10 juillet 1975.
Il l’avait déjà ébauché dans la première version de son «Iliade», mais là, il en fit le début d’une autre Iliade dont Tlemcen était l’épicentre. Ce poème a été mis cette année par la section de Tlemcen de la Fondation Moufdi Zakaria (1) comme thème de plusieurs concours dans les arts plastiques, l’interprétation musicale, la mise en chorale ou en orchestration.
Si un jour la ville de Tlemcen devait organiser des poésiades célébrant l’objet premier de son universalité, le «poème d’or» reviendrait certainement à Moufdi Zakaria pour son poème «Amdjadouna tatakellem» que la Fondation Moufdi Zakaria a édité en pages 288-294 d’une anthologie de ses poèmes sous le même titre (2).
Un colloque international sur «L’Unité chez Moufdi Zakaria», prévu par la Fondation à Tlemcen en ce mois de septembre 2005, a été reporté à une date ultérieure pour 2006, année du sixième centenaire de la mort de Abderrahmane Ibn-Khaldoun, le 17 mars 1406.
L’Association des Etudiants Nord-Africains Musulmans fut créée à Paris en fin 1927, soit une année après la création de L’Etoile Nord-Africaine. Elle n’acceptait pas dans ses rangs les étudiants maghrébins nouvellement naturalisés français qui s’étaient désistés de leur statut personnel musulman. Elle comptait parmi ses membres les étudiants maghrébins inscrits dans les universités françaises puis les étudiants des universités d’Az-Zeytouna et d’As-Sadiqiyya de Tunis, d’Al-Qaraouiyine de Fès, de l’Université d’Alger et des médersas franco-musulmanes d’Alger, de Constantine et de Tlemcen. Le premier Congrès de l’Association des Etudiants Nord-Africains Musulmans fut tenu à Tunis en 1931. Le second Congrès fut tenu en l’été 1932 à Alger. Le troisième Congrès fut tenu à Paris en décembre 1933 en lieu et place du Maroc, où sa tenue fut interdite. La présence de Messali Hadj et de Allal Al-Fassi à ce congrès renforcèrent le poids de cette jeune association dans l’évolution du problème de l’unité maghrébine en rapport avec l’Etoile Nord-Africaine. Le quatrième Congrès s’est tenu à Tunis en 1934, où Moufdi Zakaria présenta son programme de l’Unité Nord-Africaine en 10 points. Ce programme reste d’actualité pour les générations à venir. Voilà que nous sommes en ce mois de septembre 1935 à Tlemcen pour le cinquième Congrès de l’Association des Etudiants Nord-Africains Musulmans. Le sixième Congrès, prévu au Maroc en 1936, fut interdit aussi. L’histoire du mouvement étudiant maghrébin contemporain venait de vivre une première séquence. Elle nous a laissé d’abord ces poèmes cités ci-dessus qui peuvent enrichir le patrimoine culturel des enseignants de nos écoles, des animateurs de la jeunesse et des sports et des maisons de la culture à travers le territoire national. Elle nous a laissé aussi le rêve intact de la construction d’un Maghreb Uni (MU), né avant la vision d’une Europe Unie (EU), qui elle s’est déjà construite. Plusieurs séquences de transition vers la paix et la réconciliation restent à réaliser chez chacun des membres de ce MU pour retrouver le cours normal de la vision étoilée de la première inspiration fondatrice de ce projet.
1) Voir Les Conditions De Participation
Au Site De La Fondation Moufdi Zakaria: Www.Moufdi Zakaria.Org
2) Fondation Moufdi Zakaria Alger 2003: «Amjadouna Tatakallam Et Autres Poèmes De Moufdi Zakaria», Par Mustapha Ben Al-Hadj Bakir Hamouda.
3) Les Données Sur Ces Evénements Sont Puisées De La Série D’articles
Publiés Dans Al-Djamhouria En Nov./Déc. 1985, Notamment Dans La 7e Série Des Mémoires Et Evénements d’Algérie De Feu Mohamed Guenanèche,
Décédé Le 9 Décembre 2001, Et Reposant En Paix A Madrid, En Espagne.
http://www.canalalgerie.dz/news/index.php?article=366&rubrique=Actualite
http://www.archipress.org/bb/revolu.htm

http://www.decitre.fr/pi/93/9789961773093TN.gif
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [609] |
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Posté le : 10/09/2005 à 09:45 (Lu 13576 fois) | | |

1987.
" Tôt ou tard:, la physique nucléaire et la psychologie de l'inconscience se rapprocheront, alors que toutes deux, indépendamment l'une de l'autre et à partir d'horizons opposés, pénétreront plus allant le territoire transcendantal... La psyché ne peut être entièrement différente de la matière si c'était le cas, comment déplacerait-elle la matière? Et la matière ne peut être étrangère à la psyché car autrement, comment la matière pourrait-elle créer la psyché? La psyché et la matière existent clans le même monde et chacune dépend de l'autre, autrement, toute action réciproque serait impossible. Si seulement la recherche pouvait progresser assez loin, nous devrions arriver à un accord ultime entre les concepts physiques et psychologiques. Nos tentatives actuelles sont peut-être audacieuses, mais je crois qu'elles sont sur la bonne voie"
Fritjof Capra
Archives Radio:
http://www.archipress.org/audio/bb.ra
(Realaudio*, 52 minutes, 6,1 Mo)
http://www.archipress.org/audio/bb2.ra
(Realaudio, 17 minutes, 2 Mo)
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [731] |
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Posté le : 20/09/2005 à 09:14 (Lu 13569 fois) | | | DE NATIONALITES LIBYENNE ET ALGERIENNE
Des trafiquants de pièces archéologiques arrêtés à Djanet
Trois ressortissants libyens et trois algériens ont été présentés en début de semaine devant le procureur de la République près le tribunal de Djanet pour vol de pièces archéologiques, contrebande et infraction à la législation des changes. Les six individus ont été placés sous mandat de dépôt.
Selon un communiqué du commandement de la Gendarmerie nationale, le 12 septembre, lors d’une patrouille, les gardes-frontières de Oued Arrikine ont interpellé les trois Libyens en situation irrégulière et l’un des trois Algériens à bord d’un véhicule tout-terrain se dirigeant de Djanet vers le territoire libyen. Lors de la perquisition du véhicule, les éléments de la gendarmerie ont découvert 3 pièces archéologiques, 13 échantillons de silice et divers bijoux traditionnels destinés à la contrebande. C’est au cours de leurs auditions que les mis en cause ont dénoncé les deux autres Algériens impliqués dans cette affaire.
Ces arrestations relancent le débat sur le pillage du patrimoine archéologique de cette région notamment et en particulier dans la zone du Parc archéologique du Tassili. Depuis longtemps, le Sud algérien et le Tassili en particulier attirent des voleurs d’objets d’art et des pièces archéologiques de la plus haute richesse. L’on se souvient des cinq touristes allemands portés disparus près de Djanet, qui se sont avérés finalement être des pilleurs.
Ces touristes avaient été retrouvés quelques jours plus tard à bord de leur véhicule dans la région de l’erg Edmer en possession de pièces archéologiques qu’ils avaient volées au Parc national du Tassili. Le butin de la fouille de la gendarmerie était impressionnant: 31 échantillons géologiques, 113 objets archéologiques, dont des oeufs d’autruche, des pilons, des molettes, des armatures de flèches, de la céramique et des «bifaces» datant de l’ère préhistorique. Les cinq touristes avaient été condamnés par le tribunal de Djanet à des peines de trois mois de prison ferme pour vol de pièces archéologiques protégées, infraction aux réglementations relatives à la propriété de l’Office national du parc du Tassili, à la circulation des touristes dans le Sahara et l’accès au Parc national du Tassili. L’amende douanière a été fixée à 5,2 millions de dinars, en plus de quatre fois la valeur des véhicules ayant servi au transport des pièces archéologiques ainsi que la saisie des véhicules. Cette affaire avait, rappelons-le, soulevé le tollé des professionnels du désert qui avaient dénoncé des sites Internet incitant à la pratique du pillage et qui favorisent le commerce d’objets néolithiques qui se trouvent en grande quantité dans le triangle Ouargla-Djanet-Tamanrasset.
Ces arrestations, même sporadiques et limitées dans le temps, indiquent tout de même que le Sahara algérien est en passe de devenir l’eldorado de trafiquants en tous genres. Souvent ces objets, d’une valeur inestimable, passent illicitement au-delà de nos frontières avec l’aide et l’assistance de trafiquants algériens et viennent grossir les étagères des grands collectionneurs outre-mer qui n’hésitent pas à payer le prix fort.
Djamel B.
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Re: Patrimoine et sites historiques de Tlemcen [805] |
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Posté le : 28/09/2005 à 07:22 (Lu 13554 fois) | | | Tlemcen
S.O.S. vestiges en péril
Le patrimoine historique et culturel à Tlemcen est mis à rude épreuve et ce, au su de tout le monde.
De véritables actes de vandalisme à coup de béton et de ferraille sont en train de s’opérer sur les sites historiques de Mansourah. Des pans entiers d’un lieu hautement symbolique dans l’histoire de Tlemcen et de l’Algérie sont en train de disparaître sans que personne intervienne. C’est à ce sujet que M. Hakim Miloud, directeur de la culture dans la wilaya de Tlemcen, vient de saisir par correspondance toutes les administrations concernées dont la wilaya et le ministère de la Culture pour demander l’intervention urgente des autorités afin de stopper le massacre effectué sur les ruines de Mansourah, un site classé en tant que patrimoine national dans l’attente d’être classé sous la protection de l’Unesco. Déjà des équipes sont en train de l’explorer et de le revaloriser afin de le faire connaître et de l’intégrer dans le riche patrimoine universel. Mais avec l’avancée du béton qui cache complètement la vue des remparts, l’Unesco ne le prendra jamais sous sa coupe. Il en est de même pour d’autres sites à Tlemcen. C’est encouragées par la construction d’une salle de fêtes au beau milieu du patrimoine culturel cachant ainsi la vue du minaret de Mansourah aux visiteurs qui viennent par le sud, que d’autres personnes n’ont pas trouvé mieux que de procéder au lotissement d’une parcelle de terrain sans respecter les distances. Pourtant une législation abondante régit les abords des ruines et vestiges historiques renforcée ces dernières années par, bien sûr, un avis favorable du ministère de la Culture. On se demande même si les dossiers de construction qui sont en règle sur les sites de Mansourah comportent le paraphe du ministère de la Culture. La législation est très peu appliquée et de ce fait on imagine bien les atteintes portées au patrimoine culturel par des personnes qui n’ont aucune notion du patrimoine.
Les ruines, c’est vrai, sont en proie à une disparition certaine si rien n’est fait. Il y a trois mois, les travaux de construction ont été arrêtés grâce au déplacement sur les lieux mêmes d’une délégation ministérielle dirigée par le directeur national du patrimoine. Mais les travaux ont repris ce mercredi, des engins sont en train de défoncer le sol là où sont prévues des fouilles archéologiques. C’est à croire, hormis la direction de la culture, que personne n’est concerné par cette atteinte au patrimoine national. Pourtant des sommes colossales ont été investies dans la restauration des sites et l’indifférence des gestionnaires de la ville pousse à la déprédation ambiante quant à l’héritage ô combien auguste du site de Mansourah.
La ministre de la Culture est interpellée pour mettre fin à ce massacre à la bétonnière d’un musée à ciel ouvert de l’Histoire, une vitrine de choix d’un terroir recelant la mémoire du pays. Si rien n’est fait, dans quelques mois le site pullulera de salles de fêtes beaucoup plus rentables que les sites historiques.
Belbachir Djelloul
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